Cette image ne prouve pas qu’un exercice de guerre biologique est à l’origine de cas de variole du singe
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Depuis le 20 mai, des comptes Twitter et Facebook affirment qu’une ONG aurait organisé une “simulation de pandémie de variole du singe” qui serait à l’origine de la découverte récente de plusieurs cas de cette maladie. Leur preuve : une capture d’écran d’un rapport publié par le Nuclear Threat Institute. En réalité, cette simulation était entièrement virtuelle et a eu lieu en mars dernier. Elle n’a donc aucun lien avec les cas de variole du singe découverts récemment.
La vérification en bref
- Depuis le 20 mai, des comptes Twitter et Facebook partagent une image qui démontrerait que l’ONG américaine Nuclear Threat Institute (NTI) aurait organisé, le 15 mai 2022, une “simulation de pandémie de variole du singe”. La simulation coïnciderait avec la découverte récente dans plusieurs pays de cas de cette maladie.
- En réalité, cette simulation n’a rien à voir avec ces infections récentes. Il s’agissait en fait d’un exercice totalement fictif et effectué en ligne.
- La vice-présidente de l’ONG a expliqué à notre rédaction que cet exercice avait eu lieu au mois de mars 2021, soit plus d'un an avant les premiers cas de variole du singe.
Le détail de la vérification
“Un exercice de guerre biologique concernant une épidémie de variole du singe a eu lieu le 15 mai 2022 [...] Ceux qui nous gouvernent cherchent délibérément à nous tuer !”. Depuis le 20 mai, des comptes Twitter et Facebook affirment que la découverte récente de cas de variole du singe serait due à l’organisation d’un “exercice de guerre biologique”. Ces comptes tiennent pour preuve la capture d’écran d’un rapport publié par l’ONG américaine Nuclear Threat Initiative. On y voit un calendrier prévoyant plusieurs étapes, dont une “propagation de la variole du singe” prévue pour le 15 mai 2022.
Un exercice totalement fictif
Pour retrouver l’origine de cette capture d’écran, nous nous sommes rendus sur le site de l’ONG Nuclear Threat Initiative (NTI). Nous y avons retrouvé le rapport dont est issu ce calendrier. Il a été publié le 23 novembre 2021. On y apprend que NTI, ONG dont le but est de prévenir les attaques causées par des armes de destruction massive telles que des armes biologiques, a bien organisé un exercice pour examiner les conséquences que pourrait avoir une “pandémie impliquant une souche inhabituelle du virus de la variole du singe”.
Or l'introduction de ce rapport nous apprend que cet exercice a en réalité eu lieu le 17 mars 2021, et surtout, qu’il s'est tenu virtuellement. Il s’agissait en effet d’un exercice simulant une pandémie fictive dans la “nation fictive de Brinia”. Les 19 participants étaient invités à réagir lors de trois temps différents correspondant à l’évolution de cette pandémie fictive qui était notamment ponctuée de faux extraits de JT. Ce sont ces trois temps qui sont détaillés dans le calendrier fictif qui est aujourd’hui diffusé par des comptes Twitter et Facebook.
Nous avons également contacté Jaime Yassif, docteure en biophysique et vice-présidente de NTI. Coorganisatrice de cet événement, elle nous a confirmé qu’il s’agissait bien d’un exercice fictif qui a eu lieu en ligne. Jaime Yassif nous a également indiqué : “NTI a imaginé ce scénario fictif afin que les participants puissent échanger au sujet des améliorations nécessaires qui nous permettraient de mieux prévenir et répondre à d’éventuelles pandémies telles que celle du Covid-19”.
Concernant la coïncidence entre le calendrier affichant la date du 15 mai et la découverte récente de cas de variole du singe, elle nous a répondu : “Pour les besoins de l’exercice, nous avons choisi un pathogène qui serait pertinent pour notre scénario fictif. Nous avons donc choisi la variole du singe parmi d’autres possibilités”, avant d’ajouter : “Notre exercice virtuel a eu lieu le 17 mars 2021, la date du 15 mai 2022 n’était que le point de commencement de la chronologie de notre scénario fictif”.
Ce calendrier correspond donc en réalité à un exercice fictif qui a eu lieu en ligne en mars 2021 et n’a aucun rapport avec la découverte récente de cas de variole du singe. Jaime Yassif nous a d’ailleurs expliqué que l’objectif de cette simulation était “d’attirer l’attention des dirigeants sur la nécessité urgente d’amélioration des capacités internationales de prévention et de réponse aux pandémies”.