Inondations au Sud-Kivu: “C’est désolant qu’une telle catastrophe se répète sans solution”
Six jours après, les recherches se poursuivent pour retrouver les corps des habitants emportés par les eaux dans les inondations qui se sont produites jeudi 4 mai dans la province du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo. Des catastrophes similaires, bien que moins meurtrières, se produisent dans les mêmes localités chaque printemps, se désespère notre Observateur.
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Ce sont les villages de Bushushu et Nyamukubi, dans le territoire de Kalehe, qui sont les plus touchés. Une montée des eaux des rivières avoisinantes, provoquée par des pluies diluviennes, a emporté 1 200 habitations dans son sillage. Le bilan humain est lourd : 411 corps ont été retrouvés alors que plus de 5 000 personnes sont toujours portées disparues.
“Beaucoup se sont indignés qu’on enterre les victimes dans des fosses communes”
John Mulindwa, journaliste pour une radio locale de Kalehe, RCTKa, s’est déplacé dans le village sinistré de Bushushu. Il a transmis à la rédaction des Observateurs de France 24 des images des opérations de recherche.
L’éboulement s’est produit à Niyamukubi, qui dépend du village de Bushushu.
La zone est entourée de deux rivières, et quand celles-ci ont débordé à cause des pluies, les eaux ont tout emporté sur leur passage. Elles ont provoqué un éboulement de grosses pierres qui ont chuté des collines avoisinantes, emportant les maisons sur leur passage.
Des vidéos transmises par John Mulindwa, filmées le 5 mai au lendemain de la catastrophe naturelle, montrent des habitants chercher des corps, retournant avec de simples cannes la boue qui a envahi le village de Niyamukubi.
Lundi 8 mars, une délégation officielle, conduite par le deuxième vice-président de l'assemblée nationale Vital Muhini, s’est rendue à Kalehe. Elle a apporté notamment des vivres et des cercueils. Car ces derniers jours, de nombreux habitants s’étaient indignés du fait qu’on enterrait les victimes, emballées dans des sacs mortuaires fournis par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dans des fosses communes. Je ne sais pas si les cercueils vont suffire vu le nombre élevé des personnes décédées.
Une colère dont le médecin congolais Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, s’est fait l’écho. “Société civile du Sud-Kivu, exigeons une sépulture digne pour nos compatriotes décédés à Kalehe : exhumer les corps, les identifier par l'ADN, les enterrer individuellement et non dans une fosse commune” a écrit le médecin sur son compte Twitter.
Le gouvernement s’est défendu en affirmant qu’il fallait enterrer les victimes rapidement pour éviter que les corps en décomposition ne propagent de maladies, d’autant qu’une odeur pestilentielle a commencé à s’échapper de la boue.
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“Des corps ont été retrouvés jusque sur l’île d'Idjwi”
Lundi 8 mai, un deuil national a en outre été décrété dans le pays, et les drapeaux ont été mis en berne.
Les recherches se poursuivent, mais le matériel manque. Hier [mardi 9 mai] de nombreux corps ont été retrouvés jusque sur l’île d'Idjwi [la plus grande île de la RD Congo, située au milieu du lac Kivu, à mi-chemin entre la ville de Bukavu et celle de Goma, NDLR]. Ce qui est désolant c’est qu’un tel drame aurait pu être évité. C’est qu’une telle catastrophe puisse se répéter sans qu’une solution soit trouvée. En 2015 et 2020 des inondations similaires avaient fait de nombreuses victimes à Bushishi.
En 2014 déjà, le maire d’Uvira de l’époque avait déclaré cette zone impropre à la construction. Malheureusement, depuis, les autorités n’ont proposé aucune solution pour délocaliser ses quartiers… et les habitants ont continué à construire. La solution est pourtant simple : il faut fournir aux habitants un terrain alternatif, sûr, pour qu’ils puissent y construire leurs maisons.
Les blessés ont en majorité été transférés à l’hôpital de Kalehe. Quant aux familles qui ont perdu leurs maisons, il n’y a pas eu de solution d’hébergement, certaines ont été accueillies par des amis ou des proches.
L'ONU a prévenu que 3 000 familles sont maintenant sans abri à cause de la tragédie, rapporte Reuters. Les recherches sont menées notamment par des volontaires de la Croix-Rouge, des habitants et des ONG locales.