RD Congo : contre le M23, des jeunes s’engagent dans l’armée pour “aller au front le plus vite possible”
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Pour stopper l’avancée du Mouvement du 23-Mars (M23) dans le Nord-Kivu, dans l’est de la République démoratique du Congo, des centaines de jeunes sont portés volontaires pour rejoindre les rangs de l’armée. Une mobilisation qui fait suite à un appel lancé le 3 novembre par le chef de l’Etat Félix Tshisekedi. La rédaction des Observateurs de France 24 a pu s’entretenir avec l’un de ces jeunes volontaires.
Le M23, une rébellion à dominante tutsi, s’est emparée de plusieurs localités dans le Nord-Kivu, notamment celles de Rutshuru-centre et Kiwanja, lors d’une offensive lancée le 20 octobre. L’armée congolaise a affirmé de son côté avoir abandonné ses positions afin de “ne pas causer des morts inutiles” parmi la population. Le 8 novembre, l’armée congolaise aurait bombardé des positions du M23, selon des journalistes sur place.
Depuis le 20 octobre, au moins 50 000 personnes ont fui leur domicile selon les Nations Unies, et ont rejoint des camps de déplacés dans les environs de Goma.
Kiwanja et Rutshuru-centre sont situées sur la route nationale 2, un grand axe routier desservant Goma, la capitale régionale du Nord-Kivu à quelque 70 kilomètres.
Dans une allocution télévisée jeudi 3 novembre, le président congolais a appelé la jeunesse de son pays à "s’organiser en groupes de vigilance" face aux avancées du M23. Au 5 novembre, plus de 3 000 jeunes se sont enrôlés dans les Forces armées de République démocratique du Congo (FARDC), a indiqué le colonel Ndakala Faustin, directeur chargé de recrutement au sein de la 34e région militaire.
Depuis, plusieurs vidéos montrant des jeunes parader et s’entraîner à Goma, encadrés par des militaires, ont été diffusées sur les réseaux sociaux.
#RDC🇨🇩des centaines de jeunes prêts à intégrer les @FARDC_off pour combattre les #M23. Mobilisation ce lundi à #Goma pic.twitter.com/frmr9tuikU
— Justin KABUMBA (@kabumba_justin) November 7, 2022
Sur cette vidéo, des centaines de jeunes entonnent des chants patriotiques, lundi 7 novembre à Goma, encadrés par des militaires des FARDC. @kabumba_justin
#RDC: Mobilisation générale, les jeunes de #Goma très déterminés à intégrer l'armée pour défendre la nation. Première parade à l'esplanade de l'ISC Goma@PatrickMuyaya @Presidence_RDC @LukondeSama @GouvNordKivu @RDC_Minafet pic.twitter.com/X0EcrdbKJF
— Amiral (@amiralsenghor) November 5, 2022
Un responsable militaire haranguant des volontaires, le 5 novembre, à Goma. @amiralsenghor
Plus de 3.000 jeunes se font enregistrer dans l’armée Congolaise pour combattre les rebelles du #M23 pic.twitter.com/pgbS8oXoFw
— Moses Sawasawa (@moses_sawasawa) November 7, 2022
Des jeunes entonnent des chants patriotiques dans un centre de recrutement à Goma, lundi 7 novembre, à Goma. @moses_sawasawa
“Je veux aller au front le plus tôt possible”
Chipulusa (pseudonyme), 26 ans, est un habitant de Rutshuru. Il dit être impatient de rejoindre l’armée pour “défendre la patrie” :
J’ai fui Rutshuru quand les M23 sont arrivés le 21 octobre. Ma famille était partie la veille, car quand l’armée congolaise a abandonné ses positions, la population, prise de panique, a pris la fuite. Ma famille est actuellement dans un camp de déplacés, à cinq kilomètres de Goma, dans des conditions difficiles.
Je suis en train d’effectuer les formalités, je me suis rendu à un centre préparatoire pour les jeunes pour m’y enregistrer. Je serai rapidement convoqué pour me rendre à un centre d’instruction soit à Kamina [province du Haut-Lomami] soit à Kitona [province du Kongo-central]. Au centre préparatoire, les militaires nous ont dit que nous allions être appelés dans moins 48 heures. Je vais être appelé à n’importe quel moment.
“Je ne peux pas avoir des enfants en sachant qu’ils risquent de mourir à tout moment”
Je ne sais pas combien de temps va durer l’instruction, mais je veux aller au front le plus tôt possible pour défendre ma patrie et ma région, car il y en a assez de vivre dans ces conditions.
La population subit les attaques du M23 depuis 2012. Avec ma famille, nous avons déjà été obligés de quitter notre maison et de déménager pour fuir leurs attaques.
Je suis célibataire, je ne peux pas me marier et avoir des enfants en sachant qu’ils risquent de mourir à tout moment, ce n’est pas une vie. Je ne veux pas rester les bras croisés, je veux défendre ma patrie.
Le Rwanda est en train de nous imposer une guerre, il faut faire quelque chose.”
Cette nouvelle offensive du M23 intervient sur fond de fortes tensions entre la RDC et le Rwanda.
La RDC accuse le Rwanda de soutenir le M23, mais Kigali conteste et accuse à son tour Kinshasa de collusion avec un mouvement rebelle hutu implanté au Congo.
Samedi 5 novembre, l’ambassadeur du Rwanda en RDC, Vincent Karega, a été expulsé après des mois de tensions et d’accusations de soutien au M23.
Le M23 a occupé Goma pendant une dizaine de jours fin 2012, avant d’être vaincu l’année suivante par les forces armées congolaises et les casques bleus. Le mouvement rebelle a repris les armes fin 2021 en reprochant à Kinshasa de ne pas avoir respecté des accords sur la réinsertion de ses combattants.