Côte d'Ivoire

Côte d’Ivoire : pillages et violences à coup de machettes dans la ville de Divo

A Divo dans le sud-ouest de la Côte d'Ivoire, des manifestations ont dégénéré le 22 août en affrontements meurtriers. Capture d'écran.
A Divo dans le sud-ouest de la Côte d'Ivoire, des manifestations ont dégénéré le 22 août en affrontements meurtriers. Capture d'écran.
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A Divo, dans le sud-ouest de la Côte d’Ivoire, des manifestations contre la candidature à un troisième mandat d’Alassane Ouattara ont dégénéré entre le 21 et le 22 août en affrontements meurtriers entre Dioula (ethnie proche du pouvoir) et Dida (ethnie locale proche de l’opposition). Plusieurs vidéos et images montrant des scènes de violence ont été partagées sur les réseaux sociaux. Plusieurs magasins ont également été pillés.

Les scènes de violence ont eu lieu dans plusieurs quartiers (comme Konankro, Bada et Commerce). Selon plusieurs témoins, des jeunes Dioula (ethnie du Nord proche d’Alassane Ouattara) et Dida (ethnie locale) se sont affrontés à coup de machettes lors d’une marche à laquelle prenaient part des femmes partisanes de l’opposition.

"Nous sommes tous inquiets"

Serge (pseudonyme), un habitant du quartier Bada, a vu son magasin être pillé par des hommes munis d’armes blanches. Il raconte:

 

Les manifestations ont commencé très tôt vendredi dans le quartier Konankro. Les femmes de ce quartier opposées au troisième mandat du président Alassane Ouattara avaient entamé une marche.

Dans leur itinéraire, elles devaient passer devant la gare de Hiré où il y a beaucoup de transporteurs Dioula. C’est ainsi que des individus se sont opposés à elles pour les empêcher de prendre par la gare. Ils se sont mis à lancer des pierres sur les femmes.

Mais des jeunes favorables à la marche se sont soulevés. La manifestation a dégénéré. Du côté Dioula et du côté des Dida, des fronts ont été créés. Les Dioula ont commencé à attaquer avec des machettes. Parties de Konankro, les manifestations ont touché les quartiers Bada et Commerce, le centre commercial de la ville.

C’est comme cela que mon magasin a été pillé. Je suis dans l’électro-ménager. Tout a été volé et saccagé. Nous avons fermé nos boutiques précipitamment. Mais dans la nuit, les gens sont venus les piller. Ce qui n’a pas pu être emporté a été brûlé.

Nous avons tous peur. Nous sommes inquiets de la tournure que prennent les évènements.

Des vidéos publiées le 22 août, sur les réseaux sociaux et qui ont été partagées plusieurs centaines de fois montrent des scènes insoutenables de personnes brûlées ou tabassées à mort par des individus. Ces scènes se seraient également déroulées dans le quartier Konankro. Mais nous n’avons pas pu trouver des témoins des faits.

Selon l’AFP qui cite une source hospitalière, au moins deux personnes sont mortes lors de ces manifestations à Divo  dont un adolescent dans l'incendie d'un maquis-bar.

José(pseudonyme), un habitant de Konankro, affirme avoir fait partie du groupe qui a retrouvé le corps du jeune garçon:

 

Des jeunes Dioula sont entrés dans le maquis [bar local, NDLR] qui se trouve à côté de la gare. Le jeune n’a pas pu se défendre. Ils l’ont d’abord tailladé avec une machette puis ont brûlé le maquis. Nous avons retrouvé son corps le lendemain.

Toute la nuit du vendredi au samedi, il y a eu des scènes de violence un peu partout dans le quartier. Il y avait des jets de pierres et de cailloux entre les deux communautés. La gare d’Hiré a été brûlée. L’armée a dû intervenir pour mettre un terme aux tensions.

On n’arrive pas à comprendre comment une simple marche peut donner lieu à des affrontements de ce genre avec des machettes et des gourdins.

Un couvre-feu de 72h à compter du vendredi 21 août a été instauré dans la ville, de 19h à 6h du matin.

Des manifestations ont également éclaté samedi 22 août dans plusieurs villes du pays comme Bonoua, fief de l’ex-première dame Simone Gbagbo et Gagnoa, ville natale de l’ex-président Laurent Gbagbo.  

Les tensions montent en Côte d’Ivoire à l’approche de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. La Constitution ivoirienne limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs. Mais Alassane Ouattara considère que l'adoption d'une nouvelle Loi fondamentale en 2016 l'autorise à se porter à nouveau candidat, ce que ses opposants contestent.

Article écrit par Hermann Boko @HermannBoko