L'Égypte décide de faire taire Radwa Mohamed, la jeune femme qui critiquait Sissi
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Mardi 12 novembre, au soir, le hashtag #OùEstRadwa (en arabe) est apparu dans les principales tendances sur Twitter en Égypte. La cause : la disparition, jugée suspecte, d’une jeune femme qui critiquait virulemment le régime du président égyptien, Abdelfattah al-Sissi, à travers les vidéos qu’elle poste sur les réseaux sociaux. Vingt-quatre heures plus tard, la Sûreté d'État annonçait qu'elle était condamnée à quinze jours de prison.
الأمس و بعد ساعات قليل من خطف مصرية أخرى من قبل قوات الإرهاب الحقيقية فى هذا الوطن ،أمن الدولة، إنفجر تويتر غاضبا من هذا النظام العفن و مؤيدا حرية رضوى #رضوى_فين و أصبح الهاشتاج رقم واحد فى مصر.
Amr Khalifa (@Cairo67Unedited) November 13, 2019
و السؤال اليوم أين أسمها؟
أين الهاشتاج؟
أعلم ألاعيب تويتر جيدا لكن أخاف ذاكرة شعبنا pic.twitter.com/xVFnd2ZBp6
Les internautes ont rapidement repris, dans les quelques heures qui ont suivi l’annonce de sa disparition, le hashtag #رضوى_فين (#OùEstRadwa en français). Dans ses vidéos régulières, la jeune femme attaque le président égyptien et appelle les Égyptiennes à gagner la rue et manifester contre le régime.
Selon Mohamed Ali, un militant et ancien acteur connu pour ses prises de position anti-Sissi, Radwa Mohamed a été arrêtée en bas de chez elle la nuit du mardi 12 novembre. Elle l’a appelé lorsque les forces de l’ordre sont venues la chercher à son domicile, lui laissant un message de détresse pour le moins inquiétant.
Son message vocal de la nuit “Mohammed, je suis terrifiée, la Sûreté centrale est ici [pour moi], ils sont venus sur la Côte [Région côtière à l’ouest d’Alexandrie et jusqu’aux frontières libyennes]. Je suis terrifiée, la Sûreté centrale est en bas de chez moi.”
Depuis cet appel, Mohamed Ali disait n'avait ne plus avoir de nouvelles de la jeune femme. Il a posté une vidéo et fait le tour des plateaux de télévision égyptiens pour dénoncer une arrestation politique.
Mercredi 13 novembre au soir, la Sûreté d'État annonçait finalement que Radwa Mohamed passerait les quinze prochains jours en prison, au motif qu'elle a diffusé de "fausses informations".
“Les droits de l’Homme n’existent pas en Égypte”
Les vidéos de Radwa Mohamed sont très suivies et attendues par le public égyptien, vues plusieurs milliers de fois et publiées chacune sur plusieurs réseaux sociaux différents.
Pour Mohamed Ali, qui était en contact régulier avec la jeune femme, c’est la toute dernière vidéo de celle-ci qui a fini par lui attirer les foudres du régime. Dans cette vidéo mise en ligne mardi et intitulée “Les droits de l’Homme n’existent pas en Égypte”, Radwa Mohamed s’en prenait à la première dame égyptienne, Intisar al-Sissi, lui reprochant de “rester inerte face à la pauvreté et les violations majeures des droits de l’Homme” qu’exerce le régime de son mari.
Plus de 3 800 personnes arrêtées en Égypte ces derniers mois selon Amnesty International
La jeune femme dénonçait également dans cette vidéo les conditions d’incarcération en Égypte : “En tant qu’Égyptiens, on connaît tous ce qui se passe réellement en prison”, s’indignait Radwa Mohamed au début de sa vidéo. “Hier il y avait une visite officielle dans la prison de Tora. Bien sûr les officiels faisaient comme si tout était rose, alors que des prisonniers ont été blessés et tués dans cette même prison.”
L’ONG Amnesty International a dénoncé à plusieurs reprises ces derniers mois les arrestations abusives et massives d’opposants politiques au régime de Sissi.
Devant le rapport périodique du Haut Conseil des droits de l’Homme (HCDH) des Nations unies, Amnesty a appelé la communauté internationale à dénoncer la dégradation des droits de l’Homme en Égypte, dont le nombre d’arrestations bat des records depuis l’accession de Sissi au pouvoir en 2013.
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