INTOX / FRANCE

Amalgames et confusions autour des incendies d’églises en France

Des publications et des cartes tentent de comptabiliser le nombre d'églises incendiées volontairement en France. Le point dans cet article.
Des publications et des cartes tentent de comptabiliser le nombre d'églises incendiées volontairement en France. Le point dans cet article.
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À la suite de l’incendie de la cathédrale Notre-Dame le 15 avril, des internautes s’interrogent, cartes et images à l’appui, sur les nombreux incendies ayant touché des églises sur le territoire français depuis un an. Si les chiffres sont en augmentation, certaines publications sont orientées pour tromper les internautes.

Que disent les chiffres ?

Il n'existe pas de chiffres officiels sur le nombre d'incendies dans des églises catholiques. En revanche, le ministère de l’Intérieur a publié un rapport le 12 février 2019 recensant le nombre d’actes antichrétiens : ce chiffre a été stable en 2018 avec 1 063 actes recensés contre 1 038 en 2017.

Un chiffre élevé qui correspond à près de 3 actes recensés par jour, principalement des dégradations dans les églises ou les cimetières. Signe que ces chiffres sont élevés, c’est la première fois que le ministère de l’Intérieur intègre des "actes anti-chrétiens" dans ce rapport annuel qui dénombrait uniquement des "attaques de lieux de cultes".

Interrogé par Cheknews du journal Libération, le ministère a précisé qu’il estimait à "moins de 1 000" les dégradations matérielles et à "une centaine" les actions violentes. Selon Le Figaro, un bilan de la gendarmerie fait état de 877 dégradations et de 129 vols ciblant des lieux de culte catholiques en 2018.

Des chiffres déjà élevés, mais pourtant encore grossis par certaines intox sur Internet.

La carte des "attaques d’églises"… un visuel impressionnant mais fantasmé

Le 19 avril, une carte recouverte de points rouges a circulé sur Twitter, principalement relayée par des internautes américains. Elle affirme montrer tous les cas "d’attaques contre des églises" recensés en France en un an.

Sur ce tweet, l'internaute explique en anglais : "Les attaques d'églises sur les 12 derniers mois en France. Notre-Dame est peut être la cerise sur le gateau pour le multiculturalisme. Est-ce que cela sera dit ?".

 

En France, sur Twitter notamment, ou encore sur Facebook, la même carte a circulé, affirmant qu’il s’agissait des "incendies d’églises ".

 

Cette carte vient du site Christianophobie.fr administré par "l’Observatoire de la christianophobie", une association pilotée par des militants catholiques conservateurs français, Guillaume de Thieulloy et Daniel Hamiche.

 

 

La carte, qui n’a pas été mise à jour depuis décembre 2018, montre en réalité tous les actes recensés ou signalés par les lecteurs comme "christianophobes" : dégradations de cimetières, vols dans des crèches, ou même "projets de spectacle suspect" sont recensés dans cette carte. On y trouve par exemple le cas d’un maire communiste souhaitant retirer une croix d’un cimetière.

Si la carte reste bien documentée, elle ne montre en aucun cas uniquement des "attaques d’églises "ou bien des "incendies ", mais bien un ensemble d’actes.

Concernant les incendies, France 24 a pu en compter 32 sur cette carte en 2018 pour l’ensemble du territoire français. Le caractère criminel est avéré pour la plupart, mais pour d’autres, ce sont des incendies accidentels qui ont été recensés, comme sur cette église du Val-d’Oise ou encore celle-ci dans l’Ardèche, mais dont les points restent présents dans la carte. En revanche, ce décompte ne constitue pas un chiffre officiel, plutôt une revue de presse des actes.

 

 

"10 incendies criminels d’église en un an ?" Un mélange de vrai et de faux

Depuis le 19 avril, une autre publication partagée 4 200 fois affirme que 10 incendies d’églises recensés en un an ne seraient pas "accidentels ", énumérant une par une les églises concernées, dont Notre-Dame de paris, selon elle.

Une autre publication similaire, partagée plus de 35 000 fois a été supprimée le 23 avril.

 

Exemple de publication affirmant que les incendies de 10 églises citées ne seraient pas accidentels.

Dans le lot d’églises citées, ces publications mélangent incendies dont la nature criminelle est avérée, et à chaque fois relayés dans la presse locale, et d’autres purement accidentels.

Sur les dix cas cités, cinq sont des incendies volontaires avérés : l’incendie de l’église Saint-Jean-du-Bruel survenu le 28 octobre près de Rodez a été confirmée comme étant intentionnel selon Le Midi-Libre, tout comme dans l’église du Bas-Caraquet, la cathédrale Saint-Alain de Lavaur et celle de Notre-Dâme des Grâces à Revel ainsi que l'église de Saint-Sulpice à Paris.

Au moins trois cas sont en revanche des incendies accidentels dus à des court-circuit électriques, comme celles de Villeneuve d’Amont dans le Doubs en août 2018, Saint-Jacques à Grenoble en janvier 2019, et aussi l’église de Sainte-Thérèse à Rennes en août 2018.

D'autres cas sont toujours sous le coup d'une enquête : l'église d'Angoulême ou encore l’église Saint-Sulpice à Paris incendiée courant mars 2019, où les policiers privilégiant la piste d’un incendie volontaire. Quant à l’incendie de Notre-Dame, si l’enquête est en cours, la piste accidentelle a d’ores et déjà été privilégiée, selon le procureur de Paris.

 

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