Fausses armes à feu et niqabs : des fillettes provoquent un tollé en Indonésie

Des écolières qui défilent en niqab, avec de fausses armes à feu : c’est ce que montre une vidéo tournée dans les rues d’une ville indonésienne, le 18 août, et partagée plusieurs centaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux. Ces images ont provoqué un tollé dans la société indonésienne, poussant la direction de l’école à présenter des excuses.

Ces fillettes sont scolarisées dans une école maternelle à Probolinggo, une ville située dans la province de Java oriental. Elles ont défilé dans les rues de cette ville à l’occasion d’une parade culturelle organisée le 18 août, au lendemain de la fête de l’Indépendance.

La vidéo a été postée le jour-même, notamment sur la page Facebook de la ville, accompagnée de la légende suivante : "Carnaval de la maternelle dans la ville de Probolinggo, ce matin". Elle a déjà été vue plus de 620 000 fois sur cette page, sans compter les autres pages et comptes où elle a été partagée (ici par exemple).

Sous la vidéo, de nombreux internautes ont exprimé leur consternation. Beaucoup d’entre eux ont jugé que ces écolières avaient été "endoctrinées" et qu’elles n’auraient jamais dû porter d’armes, même fausses. L'un d’eux a ainsi écrit qu’elles pouvaient être directement "envoyées en Afghanistan". D’autres ont également appelé à la fermeture de l’établissement et à l’ouverture d’une enquête.

"Lors des défilés organisés pour célébrer l'indépendance, les enfants portent habituellement des vêtements traditionnels"

Yuliana (pseudonyme) vit sur l’île de Sulawesi, une autre île indonésienne. Elle revient sur la polémique.

C’est la première fois que je vois des écolières comme ça. Sur Facebook, plusieurs de mes amis ont partagé la vidéo ou en ont parlé. Ça nous a tous choqués.

Beaucoup de gens se sont demandés pourquoi ces écolières avaient été habillées comme ça. Lors des défilés organisés pour célébrer l’indépendance, les enfants portent habituellement des vêtements traditionnels, qui renvoient à l’histoire de notre pays. Ou alors ils portent des tenues militaires ressemblant à celles portées par l’armée indonésienne, ou bien de vieux uniformes militaires, renvoyant à l’histoire, là-encore. Mais les enfants ne sont jamais habillés avec ce genre de vêtements.

Là, les gens ont eu l’impression de voir des petites filles de l’État islamique. Les idées radicales peuvent se développer très tôt, dès l’école, donc c’est pour cela que les gens ont été énervés.

Ces images ont également fait réagir Bambang Soesatyo, le président de la chambre basse du Parlement indonésien, qui a estimé qu’il s’agissait d’un "spectacle inapproprié" et que cela pouvait "nuire aux idées des enfants".

Face au tollé provoqué par la vidéo, la direction de la maternelle a assuré qu’elle n’avait jamais voulu "inculquer la violence" aux enfants. Interrogée sur le choix des costumes, elle a précisé qu’elle avait souhaité évoquer "l’épreuve du prophète pour développer la foi et la piété", tout en présentant des excuses. Elle a ajouté qu’elle avait simplement récupéré des "accessoires des années précédentes pour économiser de l’argent", sans toutefois expliquer pourquoi l’école possédait de telles tenues.

Cette école de maternelle étant située sur le site d’une base militaire, le commandant de cette base s’est également excusé pour l’incident, indiquant que l’objectif n’était pas du tout de diffuser des idées radicales ou terroristes.

Leurs explications n’ont toutefois pas suffi à convaincre tout le monde, comme l’a confié Yuliana (pseudonyme). La police de Probolinggo a d’ailleurs annoncé qu’elle allait ouvrir une enquête sur cette école.

Cet incident a été d’autant plus mal perçu que l’Indonésie a été frappée par une série d’attaques terroristes en mai – auxquelles avaient participé des enfants – à Surabaya, une ville également située dans la province de Java oriental.

L'intolérance religieuse a augmenté ces dernières années en Indonésie, pays qui compte le plus de musulmans au monde et où environ 90 % de la population est musulmane.

Cet article a été écrit par Chloé Lauvergnier (@clauvergnier).