GUINÉE CONAKRY

En images : une manifestation pour la réouverture des écoles fait 5 morts en Guinée

Au moins cinq personnes sont mortes dans des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre à Conakry lundi 20 février. Photo envoyée par Noel Nogui Guilavogui.
Au moins cinq personnes sont mortes dans des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre à Conakry lundi 20 février. Photo envoyée par Noel Nogui Guilavogui.
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Tirs à balles réelles, barricades et véhicules en feu : Conakry a été le théâtre de violents affrontements entre habitants et forces de l’ordre lundi 20 février, provoquant la mort d’au moins cinq personnes. Les manifestants, qui avaient organisé des rassemblements dans plusieurs quartiers de la ville, réclamaient la réouverture des écoles, fermées par le gouvernement.

Alors que les professeurs sont en grève depuis le début du mois de février, le gouvernement a décidé le 13 février de fermer toutes les écoles du pays, y compris les établissements d’enseignement supérieur, le temps de trouver un accord. Pour demander la réouverture des écoles, plusieurs centaines d’habitants de Conakry sont descendus dans la rue lundi. La veille, un célèbre chanteur guinéen de reggae, Elie Kamano, avait déjà été arrêté pour avoir, selon son avocat, appelé à manifester. "Quand j’ai appris cette arrestation, je me suis doutée que ça allait dégénérer" explique l’une de nos Observatrice à Conakry.

Images des violences à Conakry lundi 20 février.

La mobilisation, "non autorisée" selon le gouvernement a en effet tourné au drame : cinq personnes, touchées par des tirs d’arme à feu, sont décédées, et au moins une trentaine de manifestants ont été blessés. Sur les réseaux sociaux, plusieurs images font état de coups de feu et de scènes de confusion dans les rues de Conakry.

"Policiers et gendarmes se sont mis à tirer sur la foule à balles réelles"

Notre Observateur Noel Nogui Guilavogui, 27 ans, habitant du centre-ville de Conakry a été témoin des violences.

J’étais chez moi quand j’ai commencé à entendre des coups de feu, dès lundi matin. Je me suis rendu sur place pour comprendre ce qu’il se passait. Plusieurs routes avaient été bloquées par des barricades fabriquées à partir de pneus brûlés. Des manifestants, souvent jeunes, criaient ‘À bas Alpha Condé, à bas le gouvernement, rouvrez les écoles !’. Mais les forces de l’ordre avaient décidé de mettre un terme au mouvement. Policiers et gendarmes se sont mis à tirer sur la foule à balles réelles. J’ai vu quelqu’un se prendre une balle et tomber devant moi. Ce n’était pas seulement dangereux pour les manifestants, mais pour tout le monde ! Un homme qui était simplement devant sa boutique dans la rue a également été touché par balle. Certains manifestants se sont alors mis à être violents, ce que je déplore. Il y a eu des jets de pierres et des véhicules incendiés. Ce mardi matin, la ville était encore morose… Il y avait moins de circulation que d’habitude et on pouvait encore voir quelques barricades dans la ville.

Dimanche soir pourtant, tard dans la soirée, le gouvernement avait annoncé avoir trouvé un accord et assuré que les classes rouvriraient mercredi. La cérémonie de signature de l’accord d’ailleurs bien eu lieu lundi dans l’après-midi. Mais si les syndicats ont jugé les négociations avec le gouvernement satisfaisantes, plusieurs enseignants affirment ne pas avoir été consultés et déplorent le report des discussions salariales. Pour notre Observateur, le maintien des manifestations prouve que le mécontentement est bien plus large.

"C’est aussi le signe de l’impopularité

du gouvernement d’Alpha Condé"

Même si la crise du secteur éducatif est la principale raison de cette mobilisation, son ampleur témoigne également, selon moi, d’un ras-le-bol général de la population qui est fatiguée des promesses non tenues du gouvernement. Parmi les manifestants, certains s’agaçaient de la hausse du coût de la vie à Conakry, d’autres du manque d’électrification dans la capitale, alors que le président avait promis en 2015 que ce problème serait résolu, pareil pour l’accès à l’eau… En bref, c’est aussi le signe de l’impopularité du gouvernement d’Alpha Condé.

L’année 2020 est encore loin, mais l’éventualité d’un troisième mandat d’Alpha Condé fait déjà débat en Guinée. Au début du mois, l’opposition a annoncé la création d’un front d’opposition à l’éventuel troisième mandat du président. La Constitution du pays stipule que nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non.