Le Dima Hasao est l’un des districts les moins peuplés de l’État indien d’Assam. Entièrement rural, il compte plusieurs petits villages parfois totalement isolés et dépourvus d’axes de communication pour les relier. Délaissés par les autorités, les habitants de l’un des villages ont décidé de construire eux-mêmes une route pour accéder aux centres de santé et aux établissements scolaires.
Depuis 15 ans, Aching Zeme se rend régulièrement dans les villages isolés du Dima Hasao pour inciter les familles à scolariser leurs enfants et mener des campagnes de sensibilisation dans le domaine de la santé. En novembre 2016, les habitants du petit village enclavé d’Inchaikang l’ont contacté, pour qu’il les aide à construire une route. Le village, situé dans une région montagneuse, n’était pas accessible en voiture, ce qui obligeait les habitants à marcher, parfois sur de très longues distances, pour aller à l’école ou voir un médecin.
Depuis, le projet a permis de relier Inchaikang à Boro Robi. Ce village, situé à 6 kilomètres au nord d'Inchaikang, est relié à l'axe routier permettant d'aller à Haflong, la principale ville du district où se concentrent tous les services.
"Les ambulances vont désormais pouvoir accéder au village…"
Avant que nous ne commencions les travaux, il n’y avait aucune route. Les jeunes devaient marcher deux heures pour aller à l’école, à près de sept kilomètres. Quand quelqu’un est malade, il doit également marcher jusqu’à l’hôpital ou être porté sur une civière par d’autres personnes. Les jours de marché dans les villes voisines, les villageois devaient également se déplacer… à pied. Pour aller dans la principale ville, Haflong, située à une dizaine de kilomètres, ils se rendaient à pied jusqu'au village de Jacinta, où il y a une route... En reliant Inchaikang directement à Boro Robi, qui est plus près d'Haflong, le trajet sera beaucoup plus rapide et moins difficile.
Les habitants des villages isolés marchent parfois des heures pour atteindre les villes, où sont concentrés tous les services. Photo envoyée par notre Observateur.
Les habitants d’Inchaikang sont allés voir les autorités à plusieurs reprises, mais ils sont pauvres et souvent peu éduqués… Et ils sont toujours laissés-pour-compte, personne ne s’intéresse à leurs problèmes [l’État d’Assam est l’un des plus pauvres d’Inde, NDLR].
J’ai eu envie de les aider pour que ça change. Tout est difficile pour eux. Par exemple, ils voulaient construire dans leur village une vraie église. Mais comme il n’y a pas de route, c’est impossible [difficile de transporter les matériaux, NDLR].
Les habitants construisent un pont. Photo envoyée par notre Observateur.
"Les habitants ont fait une collecte pour financer le projet"
Sur les 56 familles qui vivent là-bas, je ne connais que deux familles dont les parents sont fonctionnaires : les autres sont tous agriculteurs et travaillent au jour le jour [dans l’État d’Assam, près de 70 % des habitants vivent de l’agriculture, NDLR].
Aching pendant la construction de la route. Photo envoyée par notre Observateur.
Au début, j’ai mis mon argent personnel dans ce projet. J’avais pu investir 60 000 roupies [environ 800 euros, NDLR]. Les villageois ont également fait une collecte et participé à hauteur de 20 000 roupies. Le montant total qui était estimé pour construire toute la route était de 150 000 roupies [soit près de 2 000 euros, NDLR]. Mes amis et des connaissances ont aussi apporté de l’argent ce qui m’a aidé à concrétiser ce projet. Nous avions également monté une campagne de financement participatif.
"Dans d’autres villages aux alentours, il n’y a pas d’électricité"
Avec eux, nous avons commencé à construire cette route le 24 novembre 2016 et terminé la construction fin décembre. Nous avons formé les villageois à faire eux-mêmes : le défrichage à l'aide d'une pelleteuse, des ponts en bois, etc.
Défrichage pour le passage de la route. Photo envoyée par notre Observateur.
Nous n’avons eu l’aide de personne d’autre. Sans l’aide des villageois, ce projet aurait coûté beaucoup plus cher. Tous les jours, environ 10 personnes travaillaient sur le chantier.
La route a été inaugurée fin décembre par le chef du village d’Inchaikang. Tous les villageois étaient très heureux : ça va leur changer la vie. Maintenant, ils vont pouvoir aller vendre leurs légumes sur les marchés et ramener des matériaux de construction dans leur village. Surtout, les ambulances vont désormais pouvoir accéder au village…
Inauguration de la route. Photo envoyée par notre Observateur.
Dans le village d’Inchaikang, les habitants ont de l’électricité. Mais ce n’est pas le cas de tous les villages aux alentours, qui n’ont pas de route les desservant non plus. Cette année, j’ai décidé de continuer à m’impliquer dans ce district en reliant trois autres villages entre eux, ce qui équivaut à peu près à 9 kilomètres de route. J’aimerais également construire un petit barrage [pour faire de l’hydroélectricité, NDLR]
Les images de la route construite par les habitants :