Crise des déchets à Luanda : la ville au bord de la catastrophe sanitaire
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Des décharges à ciel ouvert près des maisons et des marchés, de l’eau stagnante marron et une odeur nauséabonde, plusieurs Observateurs nous ont fait part de leur inquiétude concernant les montagnes de déchets qui s’entassent dans la capitale angolaise, Luanda. Alors que l’épidémie de fièvre jaune sévit dans le pays et a fait près de 250 morts depuis décembre, selon l'OMS, certains craignent que de nouvelles maladies infectieuses ne se développent.
Depuis la mi-2015, la capitale de 6,5 millions d’habitants est recouverte de déchets. La municipalité affirme être à court d’argent pour payer la société de ramassage des ordures.
Pour faire face à cette importante pollution, le gouvernement a nommé un nouveau gouverneur dans la province de Luanda, le général Higino Carneiro, qui s’est donné pour principal objectif d’assainir les rues de la capitale. Celui-ci a annoncé la création d’un "poste de commandement urbain" pour lutter contre les ordures et a averti d’une possible déclaration d’"état de catastrophe sanitaire" si la situation empirait.
Mais pour notre Observateur Adriano, jeune habitant de Luanda et membre de l’association "Luanda Sem Lixo" (Luanda sans déchets), qui sensibilise aux risques causé par les ordures, il s’agit d’ores et déjà d’une catastrophe sanitaire.
"Quand il pleut, beaucoup d’eau stagne entre les déchets et crée d’énormes flaques noires qui attirent les mouches, les rats mais surtout les moustiques"
Tous les jours, quand je pars de chez moi pour aller à l’école, je traverse des montagnes et des montagnes de déchets. Le problème dure depuis un an bientôt.
Nous vivons dans ces déchets et c’est très désagréable, l’odeur est nauséabonde et on est parfois obligé de marcher dedans, mais on n’a pas le choix. Il est difficile d’avoir accès à une déchetterie et il n’y a pas de poubelles dans les rues. Du coup, les habitants jettent leurs ordures dans la rue, sur les trottoirs ou dans les caniveaux.
Certains habitants essaient comme ils peuvent de brûler les déchets ou de nettoyer un peu. Mais ils ne peuvent pas tout faire et surtout ils n’en ont pas les moyens.
Des fois les déchets s’entassent juste à côté des grands marchés de la ville… Cela pose aussi pas mal de problème de circulation pour les voitures et provoque des embouteillages dans la ville.
Ce qui m’inquiète, c’est que quand il pleut, beaucoup d’eau stagne entre les déchets et cela crée d’énormes flaques noires qui attirent les mouches, les rats mais surtout les moustiques, ce qui n’est pas bon signe en pleine période d’épidémie de fièvre jaune. Plusieurs personnes disent déjà être tombées malades à cause de l’insalubrité de leur quartier.
Jocelyne [pseudonyme] est médecin à Luanda.
L’accumulation des déchets dans les quartiers et le manque d’hygiène en général sont des vecteurs importants de transmission des maladies comme la fièvre jaune, la malaria mais aussi les maladies respiratoires et les problèmes de peau, les conjonctivites, la méningite… Si la situation ne s’arrange pas, on s’attend également à une propagation du choléra.
Depuis la chute des cours du pétrole, l'Angola est plongé dans une grave crise financière. La devise nationale, le kwanza, a perdu 35 % de sa valeur en un an face au dollar. Une crise économique qui menace la stabilité du pays, très pauvre, qui détient notamment le record du monde du taux de mortalité infantile, selon l'ONU, avec 167 décès pour 1 000 naissances.