SÉNÉGAL

Recycler des pneus en objet design pour lutter contre la pollution au Sénégal

Des habitants de Keur Moussa remplissent un pneu de sacs plastiques pour créer un banc. Photo 3000 Ecomen.
Des habitants de Keur Moussa remplissent un pneu de sacs plastiques pour créer un banc. Photo 3000 Ecomen.
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Les habitants de Keur Moussa, près de Dakar, en ont eu assez des déchets qui traînent le long des routes. Pour assainir le paysage rural, ils ont décidé de ramasser et recycler des pneus pour construire des maisons et du mobilier design.

Si le recyclage du plastique est en plein essor au Sénégal, les pratiques en matière de valorisation des déchets en sont encore à leurs balbutiements, notamment en milieu rural. À Keur Moussa, une ville près de Thiès, à 70 km à, il n’était pas rare de voir des décharges à ciel ouvert jouxter les routes. Partant de ce constat, et sous l’impulsion de l’ONG française 3000 Ecomen, des habitants ont lancé un projet de valorisation de ces déchets pour les transformer en objets mobiliers.

L’ONG, qui base son activité sur le concept de l'énergie zero (construire sans activité energivore), a plusieurs produits phares : des maisons construites à partir de matériaux recyclés et reposant sur des fondations en pneus, ou encore des bancs qui équipent des universités et des bâtiments officiels. Mais elle ne s’interdit pas d’autres réalisations plus originales, comme des lits ou des bacs à fleurs.

"Les Sénégalais doivent avoir à l'esprit que rien ne se perd, tout se transforme !"

Ousmane Sow est formateur pour l’ONG 3000 Ecomen à Keur Moussa.

Le recyclage est un thème à la mode au Sénégal, avec toute l’actualité autour du "mbous" ("sac plastique", en wolof) [et dont l’interdiction totale est entrée en vigueur le 4 janvier, NDLR]. Mais en terme de réutilisation des déchets, très peu est fait. Il existe des entreprises de recyclage, comme l'entreprise Proplast, qui produisent notamment des bassines à partir de matériaux récupérés puis recyclés. Mais la plupart des Sénégalais n’ont pas conscience que rien ne se perd, tout se transforme ! C’est très difficile d’expliquer ça à des personnes qui ont l’habitude de jeter tout ce qui est usé, parfois n’importe où.

À Keur Moussa, nous travaillons surtout autour des pneus, car nous avons remarqué qu’ils étaient souvent jetés sur les bords de route lorsqu’ils sont trop abîmés. Pourtant, c’est un excellent matériau pour les fondations d’une maison, car il compense tout mouvement et peut supporter une charge d’environ 70 tonnes. Nous plaçons ces pneus dans des tranchées, et dedans, nous compressons d’autres déchets plastiques, ainsi que de la terre et un peu de béton pour maintenir le tout. Avec cela, nous créons des fondations très solides pour des constructions. Sur cette base, nous avons construit un centre d’accueil pour des talibés (enfants étudiant dans les écoles coraniques) à Thiès.

Ousmane estime que depuis le lancement du projet avec 3000 Ecomen, l’ONG a réussi à construire sept bâtiments et environ une centaine de bancs à partir de pneus recyclés.

Utiliser des pneus pour recréer son intérieur, ça peut paraître fou ! Pourtant, nous avons réussi à créer des salons design et à moindre coût avec ces objets, ainsi que des lits ou des bacs à fleurs. La réalisation dont je suis le plus fier, c’est un ensemble de bancs construits avec des étudiants de l’université de Dakar. Nous avons créé ces objets lors de sessions de formation. Voir que le recyclage s’impose directement à l’université, ça montre qu’on arrive à insuffler d’autres pratiques auprès des nouvelles générations !

L’ONG, dont les projets étaient d’abord confinés à la région de Thiès, a réussi à s’exporter à Dakar, mais aussi au Maroc et en Tunisie, où des ateliers sont régulièrement organisés. Elle a notamment pour ambition de créer d’autres écoles avec des enfants talibés.

Si vous souhaitez contacter l’ONG, vous pouvez visiter sa page Facebook ou contactez nous à obsduclimat@france24.com

Cet article a été rédigé de le cadre de notre série "Les Observateurs du climat". Pour voir tous les autres projets, cliquez ici.