En images : l’ex-Séléka délogée des bâtiments publics dans l’est de la Centrafrique
De violents combats ont opposé les forces internationales et l’ex-Séléka dans la ville de Bria, au centre de la Centrafrique, mardi 10 février. Les rebelles y occupaient des bâtiments publics et y avaient créé une ébauche d’État parallèle depuis quatre mois. Lire la suite...
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Des éléments de la Sangaris patrouillent dans Bria, le mercredi 11 février. Sur les murs d'un centre de santé, des impacts de balle après les affrontements de la veille. Toutes les photos ont été prises par Hervé Cyriaque Serefio de Diaspora.
De violents combats ont opposé les forces internationales et l’ex-Séléka dans la ville de Bria, au centre de la Centrafrique, mardi 10 février. Les rebelles y occupaient des bâtiments publics et y avaient créé une ébauche d’État parallèle depuis quatre mois.
Les combats ont eu lieu tôt mardi matin après le lancement de l’opération Hibou par la force internationale Sangaris : les militaires avaient pour objectif de chasser les ex-Séléka de bâtiments administratifs comme la mairie ou la sous-préfecture, occupés depuis octobre 2014. Les combattants présents dans ces institutions disaient appartenir au Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), une faction dissidente de la Séléka, l’organisation rebelle s’étant scindée en deux après ses états généraux à Bambari le 25 octobre 2014.
Selon un porte-parole de la mission des Nations unies en Centrafrique, la Minusca, des "discussions de longue date" étaient en cours avec les ex-Séléka, mais elles étaient dans l’impasse, nécessitant une intervention militaire. Les forces françaises de la Sangaris étaient déjà en positions à Bria, mais attendaient l’issue des négociations pour intervenir.
Durant l'opération, 17 éléments de l'ex-Séléka ont été arrêtés, selon les forces internationales. Photo Hervé Serefio Diaspora.
"Des ex-Séléka se sont enfuis et sont maintenant en brousse à un kilomètre de Bria"
Hervé Serefio Diaspora est photographe. Il s’est rendu à Bria mercredi.Les combats ont eu lieu en plein centre-ville de Bria et les impacts de balle sur les murs de certaines administrations, notamment celle où était réfugié le général Arda [chef de la branche locale des ex-Séléka à Bria, NDLR] témoignent de la violence de l’assaut. Dans les bâtiments, les militaires ont saisi des quantités impressionnantes d’armes abandonnées. Les Sangaris sont également parvenus à arrêter 17 combattants.
De très nombreuses munitions dont des lances roquettes et des AK47 ont été retrouvés dans les bâtiments. Photo Hervé Cyriaque Serefio.
Quand nous sommes arrivés, nous n’avons vu aucun cadavre [les combats auraient fait entre 6 et 9 morts côté Séléka, aucun côté Sangaris selon les sources, NDLR]. Cependant, des civils auraient été blessés par des tirs d’ex-Séléka lorsque ces derniers se sont repliés en dehors de la ville.
Le Premier ministre et les forces internationales sont venus inspecter les bâtiments administratifs qui étaient occupés par la Séléka. Photo Hervé Cyriaque Serefio.
L’atmosphère à Bria est très pesante : dans le centre-ville, on ne voit aucun civil, seulement des patrouilles militaires. La plupart des Séléka ont réussi à fuir en brousse, notamment le général Arda [d’autres témoins joints à Bria affirment avoir vu des combattants s’enfuir "en caleçon", car l’attaque a eu lieu quand ils étaient encore au lit]. Maintenant, ces derniers seraient retranchés à un kilomètre de la ville… pour l’instant ils sont calmes [le général Arda a déclaré qu’il avait agit en "légitime défense" et que ses hommes "étaient prêts à attaquer à tout moment "].
Notre Observateur affirme que les civils à Bria sont terrés chez eux et que la ville est ratissée par les patrouilles.
"Ça fait quatre mois que je n’avais plus accès à mon bureau"
En tout, c’est une petite dizaine de bâtiments comme la gendarmerie, les bureaux des affaires sociales de la région du Haute-Kotto ou le palais de justice qui étaient occupés par les ex-Séléka. Gervais (pseudonyme) est un fonctionnaire de Bria.Les bâtiments occupés par les Séléka étaient en cours de rénovation, car ils avaient déjà été partiellement détruits lors de combats début 2014. Les travaux étaient quasiment terminés fin octobre, et j’avais pu recommencer à y travailler.
Quand les ex-Séléka sont venus nous déloger, ils ont dit qu’ils avaient besoin d’un toit pour poursuivre leurs actions, et qu’il était hors de question que les institutions de l’état centrafricain fonctionnent tant que leurs revendications n’étaient pas entendues. Ils ont ensuite nommé des sous-préfets, des gendarmes… pour instaurer une sorte d’État parallèle et tout contrôler [des habitants ont également affirmé à un média centrafricain (RJDH) que les ex-Séléka faisaient payer des taxes aux commerçants ou aux conducteurs de véhicules pour circuler, NDLR].
Ça faisait donc quatre mois que je n’avais plus accès à mes bureaux. En attendant, je tenais des permanences dans un jardin d’enfants, où j’avais un petit bureau et un téléphone. Je continuais à percevoir mon salaire, mais je ne pouvais pas assurer mon service correctement : plus d’ordinateur pour enregistrer informatiquement les demandes, on empruntait les chaises chez des habitants… comme la plupart des administrations. On espère qu’à présent, on va pouvoir reprendre le travail normalement lorsque les dégâts seront réparés.
Bria n’est pas la seule ville où les administrations de l’état centrafricain fonctionnent au ralenti. Selon le ministre de la Sécurité Publique et de l'Émigration, Nicaise Karnou, des bâtiments de Kaga Bandoro, Bambari, Ndélé et Birao seraient également occupés par des ex-Séléka (voir la carte ci-dessous). Le gouvernement centrafricain prévoit prochainement des opérations dans ces villes si les bâtiments ne sont pas libérés.
Cet article a été rédigé en collaboration avec Alexandre Capron (@alexcapron), journaliste à France 24.