IRAN

L’Iran, étape fatale pour les oiseaux migrateurs

Des millions d’oiseaux migrateurs en provenance d’Europe volent vers l’Iran chaque année, à l’automne. L’une des destinations favorites de ces volatiles se trouve près de la ville de Fereydunkenar, au bord de la mer Caspienne, dans le nord du pays. Mais pour beaucoup d’entre eux, l’escale se transforme en fin de parcours.

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Des oiseaux à vendre sur le marché de Fereydunkenar.

Des millions d’oiseaux migrateurs en provenance d’Europe volent vers l’Iran chaque année, à l’automne. L’une des destinations favorites de ces volatiles se trouve près de la ville de Fereydunkenar, au bord de la mer Caspienne, dans le nord du pays. Mais pour beaucoup d’entre eux, l’escale se transforme en fin de parcours.

Des oiseaux à vendre sur le marché de Fereydunkenar.

Pour certains oiseaux, les zones marécageuses de Fereydunkenar sont la destination finale de leur migration, tandis que pour d’autres il ne s’agit que d’une étape avant de poursuivre leur route vers le sud. Malgré l’interdiction de chasser ces oiseaux migrateurs, les derniers rapports des ONG locales sont consternants. Environ un million d’entre eux auraient été tués en 2014, soit la moitié des volatiles passés dans cette zone.

Et cette chasse est en expansion puisqu’en 2013, 700 000 oiseaux migrateurs avaient été tués, selon des ONG locales. Certains de ces oiseaux sont des espèces rares, comme l’érismature à tête blanche ou encore le fuligule milouinan.

"Cette année, on a assisté à un véritable massacre"

Saman milite en faveur de l’environnement à Fereydunkenar.

Cette année, on a assisté à un véritable massacre. Beaucoup plus d’oiseaux ont été tués car les gens ont trouvé une méthode simple pour les attraper. Ils utilisent des filets très fins, en plastique transparent, qu’ils placent dans les airs, au-dessus des étangs. Ils installent ensuite des leurres, c'est-à-dire des faux oiseaux autour de l’eau, pour donner l’impression qu’il s’agit d’un endroit sûr. Comme les filets sont invisibles pour les oiseaux, ils tentent d’atterrir et se retrouvent piégés. Les chasseurs n’ont plus qu’à les ramasser. C’est simple, pas cher, et ça permet aux gens de gagner un peu d’argent dans une zone où le taux de chômage est élevé. Certains fermiers posent des filets autour des bassins qui sont dans leur propre jardin.

Des filets dans les zones marécageuses.

Les gens vendent ensuite les oiseaux au marché de la ville, spécialisé dans la vente de ces animaux. Ce bazar est très connu et les acheteurs viennent de loin pour y trouver des oiseaux rares. Il y a deux types de clients : les professionnels qui recherchent des oiseaux rares et beaux pour les empailler, et ceux qui les achètent pour les manger. L’offre est de plus en plus importante et les prix baissent tous les ans. Par exemple, l’année dernière, un érismature à tête blanche ou un fuligule milouinan coûtaient 20 euros chacun environ. Cette année, ils en valent la moitié.

 

Ces gardes-forestiers enlèvent des filets. 

 

"Le montant des amendes n’est pas assez élevé pour être dissuasif"

On ne voit jamais personne se faire arrêter, et le montant des amendes n’est clairement pas assez élevé pour être dissuasif. [Les amendes pour chasser des oiseaux migratoires s’élèvent à 250 euros, NDLR.] Sans compter qu’il est très rare qu’elles soient appliquées. Cette année, le département iranien de l’Environnement a essayé de stopper ce massacre en envoyant environ 70 gardes-forestiers surveiller la zone et enlever les filets. Mais les gens ont résisté. Et quand les gardes les enlèvent, ils en installent tout simplement de nouveaux.

Des canards à vendre.

Du côté des activistes, on essaie de sensibiliser la population à l’importance de garder en vie ces oiseaux migrateurs, en particulier les espèces en danger. Les chasseurs amateurs, les fermiers et leurs clients ne réalisent généralement pas l’impact que cela peut avoir de "tuer uniquement une douzaine d’oiseaux" ou "d’acheter juste un oiseau". C’est pourquoi on a lancé une campagne sur Internet pour sensibiliser les gens à cette question.

Deux espèces de hibou à vendre.

Un étal à Fereydunkenar.

Un aigle royal à vendre.

Cet article a été écrit avec la collaboration de Ershad Alijani (@ErshadAlijani), journaliste à FRANCE 24.