Raids israéliens sur Gaza : les "anti", cibles de violences à Tel-Aviv
Être opposé à la politique israélienne vis-à-vis des Territoires palestiniens quand on vit en Israël n’est pas une mince affaire. Alors essayer de faire entendre sa voix quand les missiles israéliens s’abattent sur Gaza et les roquettes du Hamas sur Israël est encore plus compliqué. Témoignage d'un activiste pris à partie lors d’une manifestation contre les bombardements de Gaza. Lire la suite …
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À Tel-Aviv, des jeunes, parfois visages masqués, attaquent des manifestants qui protestent contre les attaques d’Israël sur Gaza. Capture d’écran de la vidéo ci-dessous.
Être opposé à la politique israélienne vis-à-vis des Territoires palestiniens quand on vit en Israël n’est pas une mince affaire. Alors essayer de faire entendre sa voix quand les missiles israéliens s’abattent sur Gaza et les roquettes du Hamas sur Israël est encore plus compliqué. Témoignage d'un activiste pris à partie lors d’une manifestation contre les bombardements de Gaza.
Les manifestants qui se sont rassemblés à Tel-Aviv samedi s’attendaient à devoir faire face à des troubles, car des militants de droite avaient fait savoir sur Facebook qu’ils organiseraient une contre-manifestation. Parmi eux, Yoav Eliasi, un rappeur connu sous le nom de "The Shadow", qui a exhorté ses fans à le rejoindre "en force comme des lions".
Durant la manifestation de samedi des contre-manifestants attaquent la foule à partir de 6’. Une vidéo de Yisrael Puterman.
"Les deux camps se souciaient clairement plus du face-à-face que des roquettes qui tombaient"
Michael Sappir, un Israélien qui se décrit comme militant "anti-occupation" explique ce qu’il s’est passé :Nous sommes sortis manifester contre le massacre qui a cours actuellement à Gaza. Je ne pense pas que l’on puisse appeler cela une guerre parce que les victimes ne se trouvent que d’un côté. [Jeudi, le bilan était de 230 morts Palestiniens et d’un mort côté israélien, NDLR]. En Israël, nous sommes bien défendus par le bouclier anti-missile du dôme de fer, mais les Gazaouis n’ont pas cette chance.
On manifeste plusieurs fois par semaine. Jusque-là, il y avait certes quelques mauvaises réactions de la part des passants, mais rien de grave. Ce qui s’est passé samedi nous a vraiment pris par surprise. Au début il n’y avait qu’une poignée de contre-manifestants, mais très vite ils sont devenus plus nombreux que nous. Ils cherchaient vraiment la castagne. La plupart du temps, nous étions séparés par les forces de l’ordre. Mais les policiers n’étaient pas assez nombreux. Et à un moment, la sirène signalant une attaque a retenti.
La police nous a donné l’ordre de nous diriger vers un parking qui se trouvait à proximité d’un abri, mais des contre-manifestants nous ont bloqué la route. Ils ont essayé de nous frapper et certaines femmes ont été agressées. Nous n’avons pas pu accéder à l’abri, et la police – au lieu de nous aider – nous a abandonnés pour aller se mettre en sécurité.
Nous nous sommes retrouvés seuls face aux contre-manifestants. Et ce qui était frappant, c’est que malgré les tirs du Hamas, les deux camps se souciaient clairement plus du face-à-face que des roquettes qui tombaient. On s'est interrompu une seule fois pour regarder le dôme de fer intercepter deux roquettes lancées depuis Gaza, mais ça n'a duré qu’une seconde. C’était une situation très étrange à vivre.
"Ils ont blessé un de mes amis à la tête avec une chaise"
Nous avons formé une chaîne humaine pour nous protéger. Lorsque les sirènes se sont arrêtées, la police est revenue en nous prévenant qu’elle allait retenir les contre-manifestants pour que l’on puisse partir. Mais quelques minutes après notre départ, les contre-manifestants nous ont rattrapé à moto et à pied et nous ont chargés de nouveau. Ils ont réussi à blesser un de mes amis à la tête avec une chaise. Il a dû être transporté dans une ambulance à l’hôpital. Plusieurs autres ont été légèrement blessés. On a eu de la chance que rien de grave n’ait lieu.À une minute, les manifestants sont attaqués.
J’ai peur de parler franchement, maintenant
Il s’agit définitivement de la pire attaque sur une manifestation que j’ai vue à Tel-Aviv. Des amis qui manifestent régulièrement en Cisjordanie m’ont dit que c’était pire que de se faire attaquer par l’armée. Avec l'armée, on sait à quoi s’attendre et c’est un minimum organisé. Alors que là, il n’y avait qu’une foule de gens fous de rage.J’ai peur de parler franchement, maintenant. L’atmosphère est électrique. Dès que je parle de la question palestinienne, je me mets à chuchoter car je ne sais pas qui pourrait m’écouter. D’ailleurs, les militants disent que c’est risqué de porter des T-shirt à caractère politique, à moins d’être dans un grand cortège. Et à chaque fois que l’on organise une manifestation on a peur que personne ne vienne. L’idée de se retrouver isolé est terrifiante.
Pourtant, je sais que beaucoup ici attendent que quelqu’un s’oppose au massacre. C'est le moment de parler si on veut avoir un réel impact. Le problème ici c’est que l’on ne parle jamais des Palestiniens, sauf quand ils nous attaquent.
Plusieurs partis d’opposition ont demandé à ce qu’une enquête soit ouverte sur l’intervention policière de samedi. Parmi eux, le parti Meretz, dont le leader a aussi appelé à trouver une solution diplomatique au conflit actuel. Le parti travailliste n’a, quant à lui, pas exprimé sa position sur le sujet. À droite, plusieurs voix se sont en revanche élevées pour demander au gouvernement une opération terrestre d’envergure à Gaza.