Insultes et vandalisme : la Garde nationale bolivarienne joue la provocation
Un mouvement de contestation estudiantin a commencé, il y a trois semaines, dans l’ouest du Venezuela pour se propager dans tout le pays et se transformer en mouvement populaire et politique. Une contestation réprimée par des forces de l’ordre, qui n’hésitent pas à provoquer les manifestants, histoire de jeter un peu plus d’huile sur le feu.
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Capture d'écran d'une vidéo montrant un membre de la Guardia nacional en train de briser une vitre de voiture.
Un mouvement de contestation estudiantin a commencé, il y a trois semaines, dans l’ouest du Venezuela pour se propager dans tout le pays et se transformer en mouvement populaire et politique. Une contestation réprimée par des forces de l’ordre, qui n’hésitent pas à provoquer les manifestants, histoire de jeter un peu plus d’huile sur le feu.
Cette crise a fait revenir l’opposition politique sur le devant de la scène, à travers la figure de l’ancien candidat aux élections présidentielles de 2013, Henrique Capriles. Le député a notamment pris la tête de dizaines de milliers de manifestants, le 22 février à Caracas, qui dénonçaient la politique du président Nicolas Maduro. Le successeur d’Hugo Chavez a convoqué lundi 24 février un conseil fédéral visant à réunir des membres du parti au pouvoir et de l’opposition. Mais Henrique Capriles a refusé de s’y rendre.
Les manifestations ont commencé dans la ville de Tachira, où les étudiants ont manifesté contre l’insécurité sur les campus universitaire et l’inflation. Mais depuis, la tension est montée dans les deux camps : côté manifestants, on dresse les barricades pour protéger les quartiers de plusieurs villes, dont la capitale Caracas. Et la réponse des forces de la Garde nationale bolvarienne (GNB) est brutale : le dernier bilan fait état de 14 morts - dont au moins 8 par balles - et 140 blessés parmi les manifestants.
Plusieurs images amateur témoignent de la violence de cette répression. Parmi celles-ci, une vidéo tournée à Mérida, dans l’ouest du pays, montre l’intervention d’un véhicule de la Garde nationale dans un quartier résidentiel. On y voit les gardes tirer sporadiquement sur les protestataires et s’adresser à eux avec un mégaphone. Tour à tour, ils les insultent, se moquent d’eux et les provoquent :
À 0’06, le garde chantonne :"Approche-toi un petit peu, approche-toi un petit peu, que je te fasse courir"
À 4’07 "Ce n’est pas ce qu’on m’a dit. Je pensais que ça allait être plus difficile que ça moi ! On m’a dit de venir parce que c’était dangereux, mais il n’y a que des femmelettes ici !"
À 6’35 (s’adresse à un étudiant qui a jeté un projectile vers le véhicule) :"c’est de la connerie, une cannette, tu n’as pas honte ? 5 années perdues à l’université, quel gâchis ! Enfin, s’il est vrai que tu as étudié à l’université… tu les as peut-être passées à voler, ou dans les toilettes avec quelqu’un d’autre ou à ramasser du savon…"
À 7'30, il insulte un des jeunes.
"Ils veulent pousser les jeunes à attaquer afin de justifier la répression"
Selon Josen Puleo, 33 ans, commerçant à Mérida qui a participé aux manifestations, ce comportement est inhabituel de la part de la Garde nationale :
Cette vidéo a été filmée à Campito Merida, un quartier de classe moyenne. Rien de tel n’a eu lieu dans mon quartier. Certes, on peut entendre ça et là manifestants et forces de l’ordre échanger des insultes, mais cela se passe dans le feu de l’action et pas de manière aussi provocatrice. D’ailleurs, dans la vidéo, les manifestants eux-mêmes s’étonnent d’entendre de telles insultes dans la bouche des membres de la Guardia [à 1’32, on entend quelqu’un dire "mais ils sont très grossiers, les Gardes !"].
À Merida, la moitié de la population est composée d’étudiants. Depuis le début des affrontements, les jeunes dressent des barricades à l’entrée de certains quartiers pour empêcher la Garde nationale d’entrer. Ils disent craindre que les immeubles soient saccagés par les milices proches du pouvoir.
Sur cette vidéo, on voit que les jeunes se sont mis à couvert. Je pense donc que les provocations des gardes visent à les faire sortir et à attaquer, pour ensuite justifier la répression [à 5’57, le garde se moque du jet de peinture par les manifestants et leur demande de faire preuve de "plus d’originalité". À 4’54, le garde dit "là, en journée, je n’ai envie de faire courir personne, mais la nuit peut-être..."]. C’est pour cela aussi, je pense, que la garde civile s’attaque aux biens des particuliers.
Ces cas restent toutefois rares, on ne peut donc pas parler d’une quelconque "stratégie" de la part des forces de l’ordre. Ils utilisent juste tous les moyens possibles pour en finir avec ces manifestations.