AFRIQUE DU SUD

La noyade d’un élève dans les toilettes rappelle l’insalubrité des écoles

 Un jeune garçon est mort en Afrique du Sud en se noyant dans les toilettes de son école à la suite d’une chute. Un accident dû à un équipement sanitaire non conforme aux règles de sécurité et d’hygiène mais que l’on retrouve pourtant dans de nombreux établissements scolaires du pays.

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Photo prise par l'ONG Section 27.

 

Un jeune garçon est mort lundi en Afrique du Sud en se noyant dans les toilettes de son école à la suite d’une chute. Un accident dû à un équipement sanitaire non conforme aux règles de sécurité et d’hygiène, mais que l’on retrouve pourtant dans de nombreux établissements scolaires du pays.

 

Le drame s'est produit dans l'école primaire Mahlodinela, dans la province du Limpopo, dans l’extrême nord-est du pays. Dans cet établissement scolaire, comme tant d’autres dans cette province, les toilettes sont à ciel ouvert et se résument à de larges et profondes fosses. Un porte-parole du ministère de l'Éducation nationale a confirmé que cette école était intégralement équipée de ce type de sanitaires.

 

Dans la province du Limpopo, 79 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, le taux le plus élevé d’Afrique du Sud. L’indigence des moyens alloués à l’éducation vont de paire. Les élèves en sont réduits à partager des toilettes sans siège, sans porte et qui menacent de s’effondrer à chaque instant.

 

La vidéo et les photos ont été réalisées par Section 27, une ONG spécialisée dans les droits de l'Homme.

"L’état des toilettes encourage les élèves à rester chez eux"

Nikki Stein est avocate à la section 27, une ONG spécialisée dans les droits de l'Homme en Afrique du Sud.

 

La question des installations d'assainissement de base dans le Limpopo a été portée à notre attention il y a deux ans. Les toilettes de la plupart des écoles que nous avons visitées étaient non-conformes, et même parfois absentes. Environ 80 % des établissements scolaires de la province hébergent des sanitaires muni d’un système de latrine à fosse simple. Un grand nombre de ces puits sont pleins à ras bord et attirent les serpents et les asticots. Quand les fosses débordent, les écoliers, et dans certains cas les enseignants, se soulagent dans les buissons environnants.

 

"Dans une école, les toilettes se sont effondrées en 2006 et n'ont été remplacées qu'en 2013"

Cette insalubrité a, non seulement, de très graves répercussions sur la santé mais touche aussi à la vie privée et à la dignité. La plupart des toilettes ne sont équipées ni de porte, ni de système de ventilation, ni de siège, ni même de papier hygiénique, ce qui contraint les enfants à utiliser du papier journal ou des pierres. Aucun espace n’a été prévu pour se laver les mains. Tout cela entraîne un taux d’absentéisme très élevé. Les témoignages que nous avons recueillis nous apprennent que l’état des toilettes encourage les élèves à rester chez eux.

 

Pendant la saison des pluies, il arrive fréquemment que les latrines s’effondrent en raison des mauvaises fondations. En 2013, c’est arrivé dans quatre écoles. Heureusement, ces accidents n’ont fait aucun blessé. Dans un autre établissement, les toilettes se sont effondrées en 2006 et n'ont été remplacées qu'en 2013.

"Nous avons eu un cas où deux enfants ont été mordus par un serpent venimeux dans une latrine"

 

Nous avons eu un cas où deux enfants ont été mordus par un serpent venimeux dans une latrine [les deux ont survécu à l'accident, NDLR]. Un autre élève nous a raconté qu'un jour il avait prétexté avoir oublié son livre de maths à la maison pour pouvoir se soulager. Il arrive aussi que les écoles ne soient pourvues que d’un ou deux sanitaires, du coup, les élèves font la queue pendant toute la durée de leur pause et ratent le début de leurs cours.

 

Les écoles les moins bien dotées sont celles des zones rurales et qui, durant l'apartheid, n'ont bénéficié d’aucun investissement. Les provinces du Limpopo et du Cap-Oriental sont les pires en matière d'éducation.

 

Nous avons alerté le ministère de l'Éducation en septembre 2012 sur les dangers de ces installations sommaires. En mars 2013, celui-ci nous a indiqué que 213 écoles jugées "prioritaires" allaient être équipées d’installations sanitaires conformes. En mai 2013, leur nombre s’élevait à 415.

 

Les latrines de base ont été remplacées par des toilettes répondant au nom quelque peu ironique de VIP, lesquels sont censées être plus hygiéniques et moins nocives pour la santé car elles sont munies d’un système de vidange.

 

Beaucoup d’autres écoles, tout autant dans le besoin, n’ont pas encore bénéficié de ce dispositif. Celles-ci nous sollicitent en permanence pour qu’on leur vienne en aide.

 

Le problème ne se limite pas à la province du Limpopo. Une étude révèle que l'an dernier près de 350 000 écoliers du Cap-Oriental ne disposaient pas de toilettes adéquates.

 

Un exemple de latrine dans une école de la province du Limpopo.

 

Un exemple des nouvelles toilettes qui équipent certaines écoles de la province du Limpopo.

 

Article écrit par Andrew Hilliar (@andyhilliar), journaliste aux Observateurs de FRANCE 24.