Vidéo : des lycéens yéménites battus à la chaîne par leur professeur
Non, ces lycéens ne sont pas en cours de gymnastique. Sur ces images amateurs, un enseignant les contraint à se tenir à quatre pattes afin de pouvoir les frapper un à un avec un bâton. Cette scène d’humiliation a eu lieu dans un lycée de la ville de Taez, dans le sud-ouest du Yémen.
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Non, ces lycéens ne sont pas en cours de gymnastique. Sur ces images amateurs, un enseignant les contraint à se tenir à quatre pattes afin de pouvoir les frapper un à un avec un bâton. Cette scène d’humiliation a eu lieu dans un lycée de la ville de Taez, dans le sud-ouest du Yémen.
Sur la vidéo, mise en ligne le 18 octobre, environ 200 élèves sont rassemblés dans la cours de l’établissement, alignés au sol, les bras tendus, tandis qu’un enseignant leur frappe le postérieur.
"Le proviseur n'intervient jamais pour l'empêcher de sévir"
Ahmed, un lycéen de 16 ans, a tout vu de la fenêtre de sa classe.
Ces images amateur ont été tournées deux ou trois jours avant la fête de l’Aïd [semaine du 14 au 18 octobre]. En général, les élèves subissent cette punition quand ils arrivent en retard en cours. Soit une à deux fois par semaine. Les cours commencent ici à 8 heures du matin et beaucoup d’élèves étaient en retard ce jour-là.
Moi aussi, j’ai subi ce genre de punition en d’autres occasions. Et, au-delà de la douleur physique, c’est vraiment une humiliation pour nous. L’enseignant qu’on voit sur les images, Monsieur Mansour, est connu pour être particulièrement sévère et violent. Les étudiants ont davantage peur de lui que du proviseur qui d’ailleurs n’intervient jamais pour l’empêcher de sévir. Ce genre de réprimande ne devrait pas exister dans un lycée. Nous sommes presque des adultes et on continue de nous infantiliser !
Tous les enseignants n’agissent pas ainsi. Certains nous ordonnent parfois d’acheter des feuilles et des stylos à nos camarades de classe en guise de punition [les fournitures manquent dans la plupart des établissements scolaires du pays]. C’est un moindre mal. Personnellement, je préfère payer que d’être humilié avec des coups de bâton sur les fesses devant mes camarades.
La vidéo a aussi suscité de vives critiques sur les réseaux sociaux yéménites.
"Humilier et frapper n’a jamais été une solution.[…] L’administration aurait mieux fait d’appeler leurs parents au lieu de les humilier ainsi..."
"Cette méthode n’est pas digne d’un enseignant […] C’est un ignare et il est incapable de gérer correctement des étudiants [...] Je remercie en tout cas l’élève qui a eu le courage de filmer la scène pour montrer la vérité sur les voyous de l’enseignement."
"Une enquête administrative a été ouverte et l’enseignant fait l’objet d’une suspension temporaire"
Contactée par FRANCE 24, l’ONG locale de défense des droits des enfants "All Youth " a indiqué avoir tenté d’interpeller le gouverneur de Taez sur ce "scandale", en vain. L’association envisage désormais de porter plainte contre l’enseignant et le proviseur du lycée, Abdelaziz Saïf, pour maltraitance.
Le proviseur, joint par téléphone, affirme que ces scènes sont rares et rejette la responsabilité sur l’enseignant.
Ce jour-là, des dizaines d’élèves retardataires étaient restés massés devant le lycée, bloquant la circulation des voitures, ce qui a provoqué la colère de l’enseignant. Il a donc décidé de leur infliger une punition collective. Je n’étais pas d’accord avec cette façon de faire. Une enquête administrative a donc été ouverte et l’enseignant fait l’objet d’une suspension temporaire.
En 2008, l’association internationale de développement (IDA), qui dépend de la Banque Mondiale, affirmait que l’enseignement au Yémen était globalement "de qualité médiocre en raison de la faible qualification du corps enseignant". Elle pointait par ailleurs du doigt l'insuffisance des ressources pédagogiques pour les élèves. Plusieurs programmes d’amélioration du système éducatif ont depuis été lancés, un défi particulièrement important pour le gouvernement alors que le taux de croissance de la population devrait doubler dans les 25 prochaines années. Actuellement, près de la moitié des 23 millions d’habitants du pays a moins de 15 ans.