Vidéo : une Saoudienne envoie balader un agent de la police religieuse
"Ne me cherche pas, mon frère !" Visiblement excédée d’être importunée en pleine séance de shopping à Riyad, une Saoudienne s’en prend vertement à un membre de la police religieuse. Celui-ci lui aurait demandé de se couvrir entièrement le visage, alors qu’elle est déjà vêtue du niqab traditionnel, qui laisse seulement ses yeux et le haut de son nez découverts. Un badaud a filmé la scène.
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"Ne me cherche pas, mon frère !" Visiblement excédée d’être importunée en pleine séance de shopping à Riyad, une Saoudienne s’en prend vertement à un membre de la police religieuse. Celui-ci lui aurait demandé de se couvrir entièrement le visage, alors qu’elle est déjà vêtue du niqab traditionnel, qui laisse seulement ses yeux et le haut de son nez découverts. Un badaud a filmé la scène.
Lorsque la vidéo commence, la querelle a déjà éclaté. "Rien dans l’islam n’oblige une femme à se couvrir entièrement le visage. Et j’ai déjà la moitié du visage recouverte", lance la cliente au membre de la police religieuse, reconnaissable à son foulard rouge et blanc. "Es-tu ici simplement pour me provoquer ? J’ai des enfants, et je dois faire des courses pour eux, alors laisse-moi tranquille", le mouche-t-elle. Son interlocuteur réplique mollement. Près d’eux, un policier assiste à la scène sans paraître vouloir s’en mêler.
En Arabie Saoudite, les agents du Comité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice (CPVPV), aussi appelée la "muttawa", ont pour mission de faire respecter la charia. Ce sont eux qui contrôlent la fermeture des commerces à l’heure de la prière, qui saisissent les produits considérés anti-islamiques, comme les DVD ou les CD de musique occidentale. Ils ont également le pouvoir d’arrêter les personnes au comportement jugé indécent.
"La façon de porter le voile dépend beaucoup des régions"
Mais selon notre Observateur, Mohammad Alsaeedi, la muttawa est de plus en plus mal acceptée par les jeunes générations.
La plupart des jeunes aujourd’hui refuse de se plier à la police religieuse qui surveille les gens, et les force à prier.
Une partie des jeunes femmes ne se couvre pas le visage. Mais c’est surtout une question culturelle, et ça dépend des régions. À Jeddah ou à Khobar, par exemple, ça ne pose aucun problème. À Qatif, la moitié d’entre elles garde le visage le visage découvert, même celles qui travaillent dans l’administration. Mais c’est quelque chose qu’elles ne peuvent pas faire dans la province d’al-Qasim, au nord de Riyad.
"Dans cette vidéo, le muttawa a outrepassé ses droits"
Pour Susie, une blogueuse d'origine américaine, mariée à un Saoudien, et qui vit depuis près de six ans à Jeddah, le muttawa, que l’on voit intervenir sur la vidéo, a outrepassé ses droits.
Se voiler le visage est une pratique culturelle, et n’est certainement pas rendu obligatoire par l’islam. Selon l’islam, les femmes doivent s’habiller "modestement". L’Islam dit également que les hommes, y compris ceux de la police religieuse, doivent baisser le regard quand ils sont en présence d’une femme dont ils ne sont pas un parent. Donc dans cette vidéo, le muttawa est totalement à côté de la plaque.
Ennuyer une femme qui porte un voile couvrant la moitié de son visage est très rare. Le muttawa a été un idiot et devrait être viré ; il n’est pas censé se comporter comme cela. Depuis quelques années, les Saoudiens semblent ne plus hésiter à se rebeller contre ce genre d’oppression [l'année dernière, nous avions déjà relaté un cas similaire, NDLR].
Les polémiques sur l’action de la police religieuse ne sont pas rares. Lundi 23 septembre, jour de la fête nationale à Riyad, une course-poursuite en voiture impliquant ses agents a coûté la vie à un jeune homme et a gravement blessé un autre. La vidéo de la scène, filmée par un témoin, et publiée sur Twitter avec en légende : "la Commission a tué deux hommes le jour de la fête nationale", est devenue virale. Le chef de la police religieuse, Sheikh Abdullatif Al Sheikh, a admis que cette course-poursuite avait bien eu lieu et qu’une enquête était en cours.
Article écrit avec la collaboration de François-Damien Bourgery (@FDBourgery), journaliste à FRANCE 24.