Corruption, pannes d’électricité, insécurité… Pour les habitants de Gao, rien n’a changé
Quelque 5 000 personnes ont manifesté lundi à Gao, au nord du Mali. Ils dénoncent l’inaction des autorités locales face aux problèmes qui minent leur quotidien depuis la libération de leur ville. Et affirment que leur mouvement n’est pas prêt de s’arrêter.
Publié le : Modifié le :
Publicité
Photo envoyée par notre Observateur Hamaya Ag Abdoulaye.
Quelque 5 000 personnes ont manifesté lundi à Gao, au nord du Mali. Ils dénoncent l’inaction des autorités locales face aux problèmes qui minent leur quotidien depuis la libération de leur ville. Et affirment que leur mouvement n’est pas prêt de s’arrêter.
Pour la deuxième fois en moins d’une semaine, les habitants de Gao sont donc descendus dans la rue lundi matin pour une marche qui les a menés jusqu’aux portes du palais du gouverneur. Jeudi déjà, environ un millier d’entre eux avaient manifesté leur ras-le-bol général. Parmi leurs revendications : le rétablissement de l’électricité, la création d’emplois, l’ouverture d’une université ainsi que le départ du gouverneur et des directeurs généraux de la police, de la santé, de la gendarmerie et de la garde nationale, accusés d’incompétence.
Enfin, et surtout, ils demandent le renforcement des mesures de sécurité. Car neuf mois après la libération de la ville par les troupes françaises et maliennes, la population de Gao vit dans la crainte d’un retour en force des hommes du Mujao, qui ont occupé la ville de mars 2012 à janvier 2013. Mardi 8 octobre, des attaques à l’arme lourde leur ont rappelé que les djihadistes étaient toujours là, prêts à frapper.
"Les forces de l’ordre reproduisent les comportements qui nous ont mis en danger par le passé"
Hamaya Ag Abdoulaye est l’un des organisateurs de la marche de lundi.
Nous avons remis aux autorités de Gao un cahier des charges incluant nos revendications. Dans certains quartiers, il n’y a de l’électricité qu’entre 18 heures et 6 heures. Beaucoup de gens ne peuvent donc pas travailler. Depuis la libération du nord du Mali, rien, absolument rien n’a évolué. Seules les banques ont rouvertes.
Mais ce sont surtout les conditions de sécurité et la corruption que nous dénonçons. Aux check-points, on peut passer facilement en graissant la patte des militaires. Et la police patrouille moins. Elle rackette les habitants pour divers prétextes, par exemple l’absence de papiers d’identité.
Photo envoyée par notre Observateur Hamaya Ag Abdoulaye.
La corruption n’est pas nouvelle, elle existait déjà avant la crise. Pendant l’occupation djihadiste, avec d’autres responsables de la société civile, j’avais été amené à discuter avec un chef du Mujao qui nous avait raconté qu’il avait pu se procurer en 24 heures une carte d’identité pour quelques milliers de francs CFA.
"Il faut arrêter l’hémorragie"
A ce moment-là, nous avons pris conscience des conséquences de la corruption et nous nous sommes jurés que le jour où les autorités maliennes reviendraient, nous nous battrions pour faire changer les choses. Or aujourd’hui, les forces de l’ordre reproduisent exactement les mêmes comportements qui nous ont mis en danger par le passé. Il faut arrêter l’hémorragie avant que ça ne s’aggrave.
Nous nous sentons de nouveau menacés. Nous n’avons pas de preuves formelles, mais des témoignages nous laissent penser que des djihadistes sont infiltrés dans la population. Nous allons continuer les marches et les sit-in tant que nos revendications ne seront pas satisfaites. Et la peur ne nous fera pas reculer.
Article écrit avec la collaboration de François-Damien Bourgery (@FDBourgery), journaliste à FRANCE 24.