CENTRAFRIQUE

"J'ai rencontré le nouveau leader centrafricain à Bangui"

 Tandis que le président déchu de Centrafrique François Bozizé fuyait le pays sous les coups de boutoir des rebelles du Séléka, le nouvel homme fort du pays, Michel Djotodia, s’installait, dimanche, dans l’hôtel Ledger de Bangui. Notre Observateur a rencontré le président autoproclamé dans cet établissement de luxe situé au cœur de la capitale.

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Michel Djotodia (centre) en compagnie du Premier ministre d’union nationale, Nicolas Tiangaye (à gauche), dans un des bureaux de l'hôtel Ledger. 

  

Tandis que le président déchu de Centrafrique François Bozizé fuyait le pays sous les coups de boutoir des rebelles du Séléka, le nouvel homme fort du pays, Michel Djotodia, s’installait, dimanche, dans l’hôtel Ledger de Bangui. Notre Observateur a rencontré le président autoproclamé dans cet établissement de luxe situé au cœur de la capitale.

 

Les rebelles de la coalition Séléka ont pris possession de la ville après une offensive éclair, dimanche, et chassé le président François Bozizé au pouvoir depuis dix ans. Treize militaires sud-africains, déployés à l’entrée de la ville dans le cadre d’un accord militaire entre les deux pays, ont été tués dans les combats avec les rebelles tandis que 27 autres ont été blessés, ont annoncé les autorités sud-africaines.

 

Michel Djotodia, le chef des forces du Séléka qui s’est autoproclamé président, a affirmé qu’il respectera l’accord de paix de Libreville signé le 11 janvier dernier. Le porte-parole de Michel Djotodia a fait savoir que ce dernier garderait l’actuel Premier ministre d’opposition, Nicolas Tiangaye, mais qu’un remaniement aurait lieu. Il a par ailleurs affirmé que des élections libres et transparentes seraient organisés dans les trois ans.

 

Agé d'une soixantaine d'années, Djotodia est un ancien fonctionnaire qui a rejoint les rangs de la rébellion dont il est l'un des principaux leaders depuis 2005.

 

Au lendemain du putsch, la Centrafrique a été suspendue de l'Union africaine et sept responsables de la Seleka font désormais l’objet de sanctions telles que des restrictions de déplacements et des gels d'avoirs.

 

Un pick-up du Séléka sillonnant triomphalement les rues de Bangui. 

"Ils m’ont informé que l’hôtel était réquisitionné"

Steven Hameew est consul honoraire de Belgique à Bangui. Il a participé à l'évacuation des expatriés vers l'hôtel Ledger.

 

Les rebelles du Séléka sont arrivés par dizaines à mon hôtel hier matin à bord de véhicules blindés, de pick-up et même à pieds. Ils m’ont informé que l’hôtel était perquisitionné. J’ai été étonné de voir que parmi ces soldats il y avait un nombre important de femmes ainsi que des enfants.

  

Le Président autoproclamé Michel Djotodia est lui arrivé en début d’après-midi avec d’autres rebelles. Dans ce genre de situation, il faut surtout garder son calme et savoir rester aimable avec les gens. Je l’ai rencontré et nous avons eu une brève discussion. Je l’ai trouvé affable. Il m’a notamment dit que les choses allaient rentrer dans l’ordre rapidement mais qu’il fallait faire attention car la situation allait être dangereuse pendant les deux prochains jours.

 

Il a ensuite reçu plusieurs personnalités dans la salle de conférence, notamment une personne envoyée par l’ambassade de France – toutefois, il ne s’agit pas d’un diplomate – un médiateur de la délégation du Congo Brazzaville et le Premier ministre Nicolas Tiangaye. Ce matin, il s’est rendu avec ses troupes vers l’aéroport car des tirs ont été entendus dans cette zone où est déployée l’armée française. Jusqu’à présent, je ne sais pas ce qui s’est passé car la situation est confuse. Je ne sais pas si les militaires français ont été pris pour cible où s’il s’agissait d’accrochages entre la Séléka et les Faca [armée régulière].

 

" Certains expatriés ont été pillés par des rebelles"

  

Le nouveau Président a été correct avec moi. Il a mis à ma disposition un général de la Séléka qui m’a accompagné la nuit dernière et aujourd’hui dans Bangui pour évacuer les expatriés dont les domiciles ont été pillés et saccagés. Nous avons ainsi pu évacuer des dizaines de personnes issues de divers pays vers l’hôtel : des ressortissants libanais, français, belges, libyens, yéménites, etc. Ils m’ont dit que beaucoup de pillages ont été commis par des membres de la Séléka - il s’agit en fait d’une coalition de rebelles composée de groupes disparates et donc difficile à contrôler. Ces expatriés étaient effrayés car des hommes en treillis ont fait irruption dans leur villa et les ont menacés avec des Kalachnikov avant d’emporter leurs meubles, frigos, téléviseurs, etc. Certaines personnes ont quitté leur domicile en sous-vêtements tant ils ont dû fuir vite.

 

Michel Djotodia (deuxième en partant de la gauche) et Nicolas Tiangaye (quatrième en en partant de la gauche)

Sur instruction de Djotodia, des éléments de la Séléka ont été mis à ma disposition pour que je puisse me rendre dans un supermarché que les rebelles protègent afin que je puisse acheter de la nourriture pour l'hôtel qui a  accueilli plus de 200 personnes en détresse et connaît un début de pénurie. 

 

 

Toutes les photos ont été transmises par notre Observateur Steven Hameew.