Un livret éducatif "patriotique" déclenche la colère des Tibétains
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Plus d’un millier d’étudiants tibétains ont manifesté lundi dans la préfecture autonome tibétaine de Hainan, en Chine. Rapidement réprimée par la police, la mobilisation a fait plusieurs blessés. À l’origine de ce soulèvement, la distribution d’un questionnaire éducatif jugé insultant envers la culture tibétaine.
Photo publiée sur le Facebook de Tibet Justice. Manifestation d'étudiants dans les rues de Chabcha.
Plus d’un millier d’étudiants tibétains ont manifesté lundi dans la préfecture autonome tibétaine de Hainan, en Chine. Rapidement réprimée par la police, la mobilisation a fait plusieurs blessés. À l’origine de ce soulèvement, la distribution d’un questionnaire éducatif jugé insultant envers la culture tibétaine.
Les livrets auraient été distribués par les autorités chinoises aux étudiants de l’école de médecine Sorig Lobling à Chabcha (Gonghe en chinois) dans un but d’éducation patriotique. Mais les destinataires ont immédiatement vu dans le questionnaire principal un dénigrement implicite des suicides par immolation et de la langue tibétaine.
D’après plusieurs organisations tibétaines basées à l’étranger, une vingtaine de manifestants auraient été blessés lors de l’intervention de la police et quatre sont dans un état grave. Quatre immolations ont par ailleurs été signalées entre lundi et dimanche dans les provinces du Gansu, du Sichuan et du Qinghai. Selon l’organisation international Campaign for Tibet, le nombre de Tibétains qui se sont immolés par le feu depuis 2009 s’élève aujourd’hui à 84.
De nombreux Tibétains accusent Pékin de ne pas respecter leur culture et leur religion et réclament l’indépendance de cette province de l’est de la Chine ainsi que le retour de leur chef spirituel, le Dalaï Lama. Le Tibet, ainsi que les zones tibétaines des provinces limitrophes, sont totalement interdites d’accès aux journalistes.
"Le questionnaire posait des questions pièges comme 'Quel leader est le plus à même de faire de l’égalité des peuples une réalité ?"’
Kanyag Tsering est moine tibétain en exil à Dharamsala en Inde. Il a été en contact avec des témoins des incidents à Chabcha.
La formation que les autorités ont voulu mettre en place passait par un questionnaire en 10 points ainsi que des sessions "d’éducation patriotique". Lors de ces sessions, les étudiants avaient déjà été indignés par des remarques désobligeantes et des accusations infondées concernant le Dalaï Lama, le guide spirituel bouddhiste.
Mais c’est la distribution du questionnaire qui a provoqué la colère des étudiants. Ils se sont retrouvés obligés de répondre à des questions telles que : "Comment expliquez-vous les immolations ?" "Quelles sont les conséquences des manifestations et des rassemblements illégaux ?" ou encore "Est-ce que l’éducation bilinguiste signifie la disparition des langues des minorités ?" [S’il existe une politique officielle de bilinguisme dans les zones tibétaines, Pékin fait depuis longtemps la promotion du mandarin et beaucoup de Tibétains affirment que leur langue est marginalisée.]. Dans les questions pièges, il y avait aussi "Quel leader est le plus à même de faire de l’égalité des peuples une réalité ?"
Les manifestants tibétains criant dans la rue Chabcha. Vidéo postée sur le site de Voice of America - Tibet.
Les étudiants ont commencé à scander des slogans défendant "l’égalité des peuples", la "liberté de la langue" et le "respect de la vérité". Après deux heures de rassemblement, la police anti-émeute locale est intervenue. Ils ont frappé les participants sans distinction.
Certains contacts sur place m’ont affirmé que la police avait tiré pour faire taire les manifestants mais j’ai du mal à vérifier l’information puisque les communications vers Chabcha sont totalement bloquées.Ce que l’on sait que c’est que la police anti-émeute et les forces militaires ont été déployées autour de l’école. Et les parents n’ont pas pu entrer en contact avec les étudiants hospitalisés.
Photos de manifestants blessés postées sur Voice of America - Tibet.