Une Indignée espagnole de passage à Paris : "les Parisiens ont perdu leurs illusions"
Les "Indignés" espagnols, partis en juillet de Madrid et de Barcelone pour une marche qui devrait les mener à Bruxelles le mois prochain, ont fait étape à Paris cette semaine. Selon notre Observatrice, qui arrive de la Puerta del Sol, l’accueil dans la capitale française a été plutôt décevant.
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Photo du passage des Indignés à Paris postée sur le blog Road to Brussels.
Les "Indignés" espagnols, partis en juillet de Madrid et de Barcelone pour une marche qui devrait les mener à Bruxelles le mois prochain, ont fait étape à Paris cette semaine. Selon notre Observatrice, qui arrive de la Puerta del Sol, l’accueil dans la Ville lumière a été plutôt décevant.
Le mouvement des Indignés est né le 15 mai dernier à Madrid, pour protester pacifiquement contre les mesures d’austérité prises par le gouvernement visant à faire face à la crise économique. Très suivie en Espagne, la mobilisation a rapidement rencontré un écho dans d’autres capitales européennes également frappées par un fort taux de chômage, touchant notamment les jeunes.
En juillet dernier, à l’initiative des Indignés de la Puerta del Sol de Madrid, des centaines de militants issus des mouvements indignés européens ont entrepris une "marche contre le vent" pour se rassembler le 15 octobre prochain à Bruxelles et exiger "une réelle démocratie" et "la fin de la dictature financière".
À Paris, les premières manifestations d’Indignés avaient été organisées place de la Bastille, le 19 mai dernier, mais à la différence de la Grèce ou de l’Espagne, où des milliers de personnes défilent toujours quotidiennement dans les rues, le mouvement peine à prendre dans l’Hexagone.
Depuis leur arrivée à Paris le 17 septembre, les Indignés français et espagnols se sont confrontés à deux reprises aux forces de l’ordre. Samedi 18 septembre au soir, une centaine d'entre eux a été encerclée place de la Bastille. Lundi soir, des altercations ont emmaillé leur rassemblement boulevard Saint-Germain, dans le centre de Paris. Selon des membres du mouvement, trois personnes ont été blessées et plus d’une centaine ont été conduites dans des commissariats pour des vérifications d’identité (une soixantaine selon la police).
Les Indignés face aux forces de l'ordre sur la place de la Bastille à Paris, le samedi 18 septembre.
Images du passage des Indignés à Paris postées sur le blog Road to Brussels.
"Les passants préfèrent nous regarder en buvant un verre à la terrasse d’un café"
Veronica Leandres est une artiste espagnole de 33 ans. Elle vit à la Nouvelle-Orléans (Etats-Unis) et c’est au cours d’un séjour en Espagne, en avril dernier, qu’elle a décidé de rejoindre le mouvement des "Indignés", à Madrid. Avec une centaines d’autres, elle participe à cette "marche contre le vent".
J’ai été très surprise du peu de soutien populaire à notre arrivée à Paris, samedi dernier, et même choquée du peu d’engouement des jeunes. Quand nous nous sommes retrouvés place de la Bastille et que les policiers nous ont encerclés, personne n’a réagi. Les passants continuaient leur chemin et préféraient regarder la scène en buvant un verre à la terrasse d'un café. J’ai vraiment eu le sentiment que nous n’étions pas les bienvenus.
En fait, j’ai l’impression que notre mouvement n’intéresse personne ici. Cette semaine, j’ai eu l’occasion de distribuer des tracts dans la rue pour informer le public des actions qui se déroulaient ces jours-ci à Paris. La plupart du temps, les gens m’ont ignorée, comme si je n’existais pas ou comme si j’essayais de vendre quelque chose. Pourtant, je suis présentable et je m’habille tout à fait normalement ! Et quand quelqu’un me laissait terminer ma phrase, ça n’allait pas plus loin qu’un "merci, au revoir".
Les Parisiens ont perdu leurs illusions. Ils sont trop centrés sur leurs propres problèmes et sur leur vie personnelle. Pour eux, un mouvement de jeunes ne pourra jamais changer le monde. En même temps, nous sommes dans une capitale. Je suis sûre que nous aurions été accueillis de la même manière à New York. Et puis, quand je vois à quel point la police est violente, je peux comprendre que beaucoup de gens préfèrent rester chez eux plutôt que de se rassembler pour revendiquer un idéal."
Photos du campement que les Indignés ont été autorisés à installer sur le terre-plein du Palais omnisport de Bercy, à Paris, pour la nuit du 20 au 21 septembre. Postées ici.
Image du passage des Indignés à Paris postée sur le blog Road to Brussels.