Bahreïn

Décès d'un adolescent lors d'une manifestation au Bahreïn : "La contestation va reprendre"

 Un adolescent de 14 ans est mort, ce mercredi, lors d’une manifestation à Sitra, au Bahreïn. L’opposition affirme qu’il a été tué par une capsule de gaz lacrymogène tirée à bout portant par la police. Cet incident pourrait marquer le retour des troubles dans le pays.

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Capture d'écran de la vidéo de l'adolescent au centre hospitalier de Sitra. Compte tenu du caractère choquant de la vidéo, nous avons décidé de ne pas la publier. 

 

Un adolescent de 14 ans est mort, ce mercredi, lors d’une manifestation à Sitra, au Bahreïn. L’opposition affirme qu’il a été tué par une capsule de gaz lacrymogène tirée à bout portant par la police. Cet incident pourrait marquer le retour des troubles dans le pays.

 

La victime se nomme Ali Jawad Ahmad. Avec son oncle, le jeune homme participait à une manifestation dans le village de Sitra, à l’occasion de la fête musulmane de l’Aïd-el-Fitr.

  

Selon Mohammed al-Maskati, président de l’organisation de défense des doits de l’Homme BYSHR, la manifestation était pacifique :

 

La police a chargé les manifestants, les visant notamment avec des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc. L’adolescent aurait été touché par une capsule de gaz avant de s'écrouler. Il a ensuite été transporté au centre de soin de Sitra, qui a immédiatement été encerclé par la police, avant d'être conduit à l’hôpital. On ne sait pas s’il était encore en vie lors de son transfert."

 

Centre hospitalier de Sitra, mercredi matin. Photo publiée sur le site de BYSHR. 

  

Les autorités bahreïnies ont confirmé la mort du jeune homme. Elles n’ont toutefois pas donné de détails concernant les circonstances du décès, assurant qu’elles allaient mener l'enquête. Des témoins cités par les agences de presse affirment que, lors de cette manifestation, les policiers ont tiré des gaz lacrymogènes directement sur les manifestants alors que ce type de projectile se tire habituellement en l’air.

 

Un mouvement de contestation était né au Bahreïn au mois de février, dans la foulée des révolutions tunisienne et égyptienne. Une contestation menée par la communauté chiite. Majoritaires dans le pays, ces derniers sont tenus à l’écart du pouvoir par la famille royale sunnite. Ils s’estiment par ailleurs victimes de discriminations. La répression de ce mouvement avait fait 30 morts et avait donné lieu à 1000 arrestations au moins. Après l’instauration de la loi martiale et l’intervention d’une force armée constituée d'éléments issus de plusieurs pays du Golfe - et principalement d’Arabie saoudite - la contestation avait provisoirement cessé. Mais depuis le début du ramadan, les troubles ont repris.

 

D’après notre Observatrice, Yas, une expatriée française, le mouvement de contestation prend une tournure de plus en plus confessionnelle.

 

J’ai le sentiment que les revendications démocratiques sont passées à l'arrière-plan et qu’il s’agit vraiment d’un conflit entre chiites et sunnites. J’espérais vraiment que les choses allaient se calmer. La communauté des expatriés est inquiète. Hier, je suis allée chercher l'une de mes amies en voiture dans le quartier de Juffair [à Manama, la capitale, NDLR], où il y a beaucoup d’expatriés. Elle avait peur et m’avait demandé de la mettre à l’abri. Les manifestants avaient bloqué les routes près de chez elle alors qu’auparavant, ils ne venaient pas dans son quartier, où vivent beaucoup d’expatriés. Il y a eu une recrudescence des violences depuis la semaine dernière. Des voitures incendiées, des jets de pierres et même des cocktails Molotov. Si cela continue comme ça, beaucoup d’expatriés vont partir."

 

Photo prise par notre Observatrice Yas à Juffair, dans la banlieue de Manama, la capitale bahreïnie, le 30 août. 

 

L'un de nos Observateurs chiites dans le pays, Ahmed Bahrain, conteste cette vision du conflit sous l’angle confessionnel.

 

Nous demandons des droits politiques et une monarchie constitutionnelle qui bénéficieraient aux sunnites comme aux chiites. Je ne sais pas pourquoi les sunnites ne se révoltent pas avec nous. Peut-être ont-ils peur ? Ce que je peux dire, c’est que nous sommes un peuple pacifique et que nous n’allons pas tomber dans le piège tendu par les autorités, qui jouent la carte de la division confessionnelle. Quant aux violences, elles sont marginales. Effectivement, lorsque les forces de police attaquent en utilisant des moyens disproportionnés, les manifestants répliquent en jetant des pierres et en bloquant des rues. C’est ce qu’il se passerait n’importe où dans le monde. Avec la mort du jeune martyr ce matin, je suis sûr que la révolte va reprendre de plus belle."