Les Saoudiens se révoltent contre les radars mobiles
Les Saoudiens apprécient les grosses voitures et les pointes de vitesse sur l’autoroute. Alors pas étonnant que l’installation de radars mobiles sur les routes du royaume les ait faits sortir de leurs gonds, d’autant plus que cela leur coûte une petite fortune en amendes.
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Capture d'écran d'une vidéo tournée dans la ville de Taif où de jeunes étudiants attaquent à coups de pierres et de chaussures un radar mobile. Vidéo postée le 26 juin 2011 sur YouTube par abnzabn.
Les Saoudiens apprécient les grosses voitures et les pointes de vitesse sur l’autoroute. Alors pas étonnant que l’installation de radars mobiles sur les routes du royaume les ait faits sortir de leurs gonds, d’autant plus que cela leur coûte une petite fortune en amendes.
Avec plus de six mille morts sur les routes enregistrés en 2007, les routes saoudiennes figurent parmi les plus meurtrières au monde. Le gouvernement saoudien a décidé de réagir en 2010 en lançant un nouveau système électronique de contrôle routier appelé "Saher" ( "celui qui veille", en arabe). Les pouvoirs publics espéraient ainsi améliorer la sécurité routière en faisant usage des dernières technologies, au nombre desquelles les radars mobiles, permettant de verbaliser les conducteurs en infraction.
Mais depuis plusieurs mois, les automobilistes s’attaquent directement à ces nouvelles machines car ils considèrent que ce nouveau système de contrôle routier est abusif.
"Des véhicules banalisés des sociétés privées qui gèrent le système Saher ont été attaqués"
Mohammed Alsaeedi vit à Qatif, ville située sur la côte occidentale de l'Arabie saoudite.
J’ai une voiture mais j’ai toujours peur de prendre le volant car ici, en Arabie saoudite, les accidents de la route sont fréquents. Les automobilistes conduisent très vite car ils sont tout le temps pressés et ils ne font pas attention aux autres usagers.
Depuis la mise en place du système Saher, il y a plus d’un an, les routes des principales villes du royaume sont surveillées par le ministère de l’Intérieur grâce à un réseau de caméras et de radars fixes et mobiles. Le système Saher répertorie les dépassements de vitesse - la limite est de 80 km/h en ville et entre 120 et 140km/h sur les autoroutes - ou encore les franchissements de feu rouge.
Dès qu’une infraction au code de la route est enregistrée, une notification de l’amende à payer est envoyée au conducteur par SMS s’il a donné ses coordonnées au ministère de l’Intérieur. Dans le SMS reçu, il peut obtenir des détails sur cette amende, comme le lieu de l’infraction où l'infractin a été constatée, par exemple. Ces amendes peuvent aussi lui être signalées sur le site du ministère.
Il a alors 30 jours pour payer. Au-delà de ce délai, le montant de l’amende peut doubler, voire tripler. Une amende de 300 riyals saoudiens [56 euros, NDLR] peut passer à 900 riyals [168 euros, NDLR] en quelques semaines.
Aujourd’hui, beaucoup de conducteurs sont excédés par ce système Saher qui, selon eux, n’est qu’une manière de gagner de l’argent sur le dos des conducteurs. Le ministère de l’Intérieur a délégué la gestion du système à quatre entreprises privées. Beaucoup critiquent ce partenariat, car ils pensent que ces sociétés privées profitent de cet accord pour faire du profit. Après tout, l’objectif des entreprises privées est de gagner toujours plus d’argent.
Vidéo tournée dans la ville de Taif où de jeunes étudiants attaquent à coups de pierres et de chaussures un radar mobile. Vidéo postée le 26 juin 2011 sur YouTube par abnzabn.
"Des centaines de personnes ne peuvent plus payer leurs amendes."
Les radars mobiles sont installés dans des véhicules banalisés souvent garés le long des routes. Un seul radar mobile du système Saher peut enregistrer des centaines d’infractions chaque jour. Ainsi, un seul automobiliste peut recevoir plusieurs amendes pouvant atteindre plusieurs milliers de riyals. Or, ici, le salaire moyen d’un chauffeur saoudien est équivalent à 2 000-2500 riyals [372-466 euros]. Les chauffeurs étrangers gagnent moins : entre 1 000 et 1 800 riyals [186-335 euros].
Avant la mise en place du système Saher, on pouvait obtenir une réduction des amendes dans certains cas. Aujourd’hui, c'est impossible. Résultat, des centaines de personnes ne peuvent plus payer et la somme totale de leurs amendes ne fait qu’augmenter.
Certains automobilistes ont choisi de ralentir à l’approche des radars fixes ou mobiles qui se trouvent souvent aux mêmes endroits, là où la circulation est la plus dense. Mais d’autres se sont révoltés à travers le pays. Des véhicules banalisés des sociétés privées qui gèrent le système Saher ont été attaqués à coups de pierres et de chaussures. D’autres véhicules ont été tagués.
Malgré le système Saher ou les campagnes de sensibilisation lancées par les pouvoirs publics, les mentalités ont peu changé. Les comportements sur la route sont toujours aussi dangereux."
Radar mobile vandalisé à partir de 0’50. Vidéo postée le 15 mai 2011 sur YouTube par thamer504.
Un conducteur saoudien tague le pare-brise d’un radar mobile. Vidéo postée le 22 mai 2011 sur YouTube par m3aaaand.
Trois véhicules du système saher positionnés le long de la route. Vidéo postée le 1er septembre 2010 sur YouTube par mll7000.
Billet écrit en collaboration avec Cécile Loïal, journaliste à France 24.