Nos Observateurs au Japon se demandent ce qu’ils doivent faire face à la menace nucléaire
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En regardant les informations sur la centrale de Fukushima Daiichi, nos Observateurs, des Français installés dans l’archipel, ont eu des réactions très différentes. L’une s’est mise en route pour rejoindre le sud du pays, un autre s’est mis très en colère contre l’ambassade de France, le troisième a continué de vivre comme si de rien n’était.
Une foule compacte attend les bus en direction de l'aéroport de Narita, à Tokyo, le 16 mars 2011. Postée sur TwitPic par jameswest2010.
En regardant les informations sur la centrale de Fukushima Daiichi, nos Observateurs, des Français installés dans l’archipel, ont eu des réactions très différentes. L’une s’est mise en route pour rejoindre le sud du pays, un autre s’est mis très en colère contre l’ambassade de France, le troisième a continué de vivre comme si de rien n’était.
La centrale nucléaire de Fukushima a subi de graves dégâts lors du tremblement de terre et du tsunami qui ont ravagé l'archipel le 11 mars. La population a été évacuée dans un rayon de 20 km autour de l'installation, soit plus de 200 000 personnes.
Le porte-parole du gouvernement japonais, Yukio Edano, a déclaré, le 16 mars, que les radiations au-delà de cette zone évacuée "ne représentent pas un danger immédiat pour la santé". Il a précisé que le niveau de radiation relevé "près de la centrale" était de 1 500 microsieverts par heure. À Tokyo, un niveau de 0,809 microsievert par heure a été enregistré le 15 mars, alors que le niveau normal est de 0,035 ou 0,036. Un niveau qui n'affecte pas le corps humain, selon les autorités municipales.
Billet rédigé en collaboration avec Paul Larrouturou et Lorena Galliot, journalistes à France 24.
"Tout ce que l’ambassade de France trouve à nous dire, c’est de rester chez nous autant que possible !"
Alexis Borreca est français, il habite à Tokyo avec sa femme japonaise et leur fille de 10 ans.
Je suis très inquiet du risque nucléaire. Fukushima est à 200 km de Tokyo. C’est une centrale énorme et les dernières images montrent des fissures importantes dans les parois entourant les réacteurs. Les radiations sont une menace terrifiante, surtout pour le père de famille que je suis : je me sens impuissant pour protéger mon enfant.
Je suis aussi très en colère. Les informations qu’on nous donne sont contradictoires. Un jour, tout va bien, le lendemain, on parle d’un niveau de radiations dix fois supérieur à la normale à Tokyo. Tout ce que l’ambassade de France trouve à nous dire, c’est de rester chez nous autant que possible et de remplir nos baignoires d’eau ! C’est scandaleux.
Malheureusement, on ne peut pas partir du jour au lendemain. Si on sautait dans le premier vol pour la France, on ne pourrait emmener que le minimum. Et puis, ma femme est salariée dans une grande entreprise japonaise... Si elle part aujourd’hui, elle risque d'être licenciée."
"Je fuis vers le sud le plus vite possible"
Emilie Pichard a quitté Tokyo et est en route vers le sud de l’archipel. Elle tient un blog sur le Japon.
Après le séisme, je suis restée cloîtrée trois jours avec ma famille d'accueil japonaise à regarder les flashs d’informations et les reportages diffusés en boucle à la télévision.
Je me sens en extrême décalage avec les Japonais
En tant qu’étrangère, je me sens en extrême décalage avec les Japonais. Quand je leur explique que je pars vers le sud le plus vite possible, beaucoup me répondent : "Ah oui, je vois, les séismes sont effrayants, n'est-ce pas...". Ils ne semblent pas penser au risque nucléaire et se sentent en sécurité.
Personnellement, j’ai peur des radiations, car je ne sais pas quel impact elles peuvent avoir sur moi. Les informations sont vagues. Les communiqués officiels des autorités japonaises nous informent au compte-gouttes sur la situation à Fukushima, sans compter qu'ils semblent en minimiser l'importance pour ne pas effrayer la population.
Je suis actuellement à Kyoto pour une durée indéterminée. Il est possible que j'aille jusqu'à Nagasaki la semaine prochaine, ou bien à Tokyo, à moins que je ne rentre en France, selon l'évolution de la menace.
Un centre d'examens provisoire pour tester le niveau de radiation dans la corps humain a ouvert a Fukushima. Photo postée sur TwitPic par markmackinnon.
"Je n’ai pas vraiment peur"
Robin Swezey est étudiant à Nagoya, à environ 350 km au sud de Tokyo, depuis deux ans.
On oublie que les tremblements de terre sont fréquents ici. Je lis partout que les Japonais font preuve d'un calme remarquable face aux secousses sismiques. C’est faux, ils sont simplement habitués !
[Le 15 mars], j’ai fait mes courses à 22h et pour la première fois j’ai vu une immense file d’attente. Il n'y avait plus de riz, plus d’eau, plus de thé (ils en boivent autant que d’eau), plus de nouilles instantanées. Dans les magasins, les produits de première nécessité sont pris d’assaut.
Les rayons d'un supermarché à Nagoya, le 15 mars.
Les rayons de riz et de nouilles instantanées sont dévalisés. Photos envoyées par Robin Swezey.
Mes proches me demandent souvent si j’ai peur, à cause de ce qui s'est passé à la centrale de Fukushima. Mais elle est trop éloignée pour que je m’inquiète. Je n’ai donc pris aucune précaution. Je n’ai pas vraiment peur et vais rester."