CUBA

Les "balseros" cubains : prêts à tout pour mettre un pied aux États-Unis

 Cette vidéo montre des émigrés cubains à bord d’un radeau de fortune recueillis en pleine mer par un bateau de croisière. Un enregistrement qui a ravivé le débat sur les risques que les clandestins sont prêts à prendre pour passer aux États-Unis.

Publicité

 

Cette vidéo montre des émigrés cubains à bord d’un radeau de fortune recueillis en pleine mer par un bateau de croisière. Un enregistrement qui a ravivé le débat sur les risques que les clandestins sont prêts à prendre pour passer aux États-Unis.

 

Des membres de l’équipage du bateau Monarch of the Seas, appartenant à la Royal Caribbean, sont venus en aide dimanche 5 décembre à une femme et cinq hommes sur un radeau perdu en pleine mer, balloté par les flots. Ils leur ont donné de quoi manger et boire. Il s’agissait de six ressortissants cubains qui tentaient d’atteindre les États-Unis à travers le Golfe de la Floride.

 

Ces "balseros" (nom dérivé de "balsa" qui signifie barque en espagnol) rêvent d’obtenir l’un des 20 000 visas que Washington promet de mettre chaque année à la disposition des clandestins cubains qui arrivent jusqu’au pays . Des candidats à l’émigration qui, souvent, se transforment en candidats au suicide.

 

"Vous ne pouvez pas imaginer les risques que les Cubains sont prêts à prendre"

Maykel Crespo est cubain, il vit aux États-Unis depuis 9 ans. Il a tenté cette traversée périlleuse non moins de sept fois. Arrivé à 19 ans, il a poursuivi des études en Amérique et travaille aujourd’hui comme employé dans une banque. Il tient également un blog.

 

Le point le plus au sud des États-Unis, et donc le plus proche de Cuba, est Cayo Hueso, une localité de Floride. L’île se trouve à 90 miles des côtes cubaines [environ 140 km]. C’est l’endroit que visent tous les candidats cubains à l’émigration clandestine.

 

Les embarcations qui sont utilisées par les émigrés clandestins varient selon les moyens dont disposent ces derniers. Ceux qui arrivent à disposer de 10 000 dollars embarquent à bord de bateaux en bon état, avec une douzaine de personnes à bord, en plus du passeur. Pour s’orienter, ils utilisent carrément des GPS. La traversée ne dure alors que 8 ou 9 heures. Les autres, par contre, en sont réduits à des radeaux de fortune et des embarcations extrêmement précaires comme celle qu’on voit sur la vidéo. Ces émigrés-là se mettent à cinq ou six et construisent eux-mêmes leur embarcation avec les moyens du bord. Chacun ramène tout ce qu’il peut trouver à portée de main : des pièces détachés de camions, des roues, des bouts de bois ou de plastique. Ils ne s’orientent qu’à l’aide d’une boussole et mettent plusieurs jours à arriver s’ils ne se perdent pas.

 

Il existe une loi des "pieds secs" et des " pieds mouillés" qui régit les rapports entre les deux pays sur ce plan. Selon cette loi, un clandestin a légalement le droit de résider aux États-Unis à partir du moment où il met le pied sur le sol américain. Du coup, vous ne pouvez vous imaginer les risques que les Cubains sont prêts à prendre pour pouvoir poser un pied aux États-Unis. S’il est arrêté par les garde-côtes, il est automatiquement refoulé à Cuba. Ils vendent tout ce qu’ils possèdent, contractent des dettes et mettent en danger leur vie pour réussir cette opération, même s’ils doivent pour ça abandonner femme et enfants.

 

Il arrive cependant que, dans certains cas, des clandestins soient arrêtés mais arrivent tout de même à accéder au territoire américain. Par exemple, si le candidat a besoin d’être hospitalisé de toute urgence, il sera débarqué sur les côtes américaines pour bénéficier des soins et accèdera, par ce moyen, à un droit de résidence aux États-Unis. Dans d’autres cas, le malheur des uns fait le bonheur des autres. J’ai un cousin qui vit depuis trois ans aux États-Unis grâce à un malheureux événement. Lors de la traversée, l’un des passagers était décédé. De fait, lorsque les gardes-côtes américains ont intercepté le bateau, ils ont dû ouvrir une enquête pour déterminer les circonstances de ce décès et mon cousin a été retenu comme témoin dans cette affaire. C’est cynique mais, grâce à cela, il a pu rester aux États-Unis.

 

Cette loi, ajoutée aux conditions très précaires dans lesquelles les Cubains vivent chez eux, fait qu’ils se représentent les États-Unis comme une terre de toutes les opportunités. Pour eux, le plus dur reste d’échapper aux garde-côtes cubains. L’Amérique, c’est le salut."

Vidéo du radeau des six balseros. Publiée sur YouTube par psycogrl238.

 

Cet article a été rédigé en collaboration avec Sarra Grira, journaliste à France 24.