La statue la plus haïe de Moscou
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Le "monstre de Moscou", monument à la gloire de l’empereur Pierre le Grand unanimement détesté par les Moscovites, va probablement être retiré, à la suite du limogeage du maire qui protégeait le sculpteur.
Photo publiée sur Flickr le 11 juin 2006 par Captain Chaos.
Le "monstre de Moscou", monument à la gloire de l’empereur Pierre le Grand passionnément détesté par les Moscovites, va probablement être retiré, à la suite du limogeage du maire qui protégeait le sculpteur.
Un tsar en armure, à la barre d’un navire aux voiles repliées, un document à la main : le colosse de 98 mètres réalisé par Zurab Tseretelli, situé sur les rives de la Moskva, à environ un kilomètre du Kremlin, est unanimement détesté en Russie, à la fois du grand public et des critiques d’art.
Yuri Luzhkov, maire de Moscou récemment limogé, ami proche de Tseretelli, protégeait l’œuvre et son auteur de toutes les critiques. Peu après son départ brutal, l’enlèvement de la statue est redevenu au goût du jour. Certaines petites villes russes qui possèdent peu d’attractions touristiques (comme Petrozavodsk, Voronezh, Oriol, Ivanovo et même la République de Transnistrie, non reconnue) sont prêtes à l’accueillir.
Selon plusieurs sondages, la sculpture serait le monument la plus détesté de Moscou. En 2008, le site Virtual Tourist l’a inscrite dans son classement des dix bâtiments les plus affreux du monde. Un groupe extrémiste a même essayé de la faire sauter, sans succès. De plus, la rumeur veut qu’il s’agisse d’une statue de Christophe Colomb, mais qu’après avoir été rejetée par plusieurs villes américaines (New York, Baltimore, Miami), sa tête aurait été remplacée par celle de Pierre le Grand pour être vendue au gouvernement russe. Elle a été érigée en 1997 à Moscou.
Aujourd’hui, il ne demeure que quelques hommes politiques moscovites pour s’opposer à l’enlèvement de la statue, affirmant que l’opération serait trop coûteuse – environ 1 milliard de roubles [soit 24 millions d’euros].
Photo publiée sur Wikimedia Commons.
"Si ce déménagement coûte trop cher à la ville, les Moscovites se cotiseront et les sponsors se battront"
Marat Guelman est le directeur du Centre national pour les arts contemporains. Il propose une collecte pour financer les frais d’enlèvement de la statue de Pierre le Grand.
Je pense qu’il est désormais tout à fait possible de déménager ce colosse hors du centre historique de Moscou. Tout le monde pense que cela devrait se faire : les architectes, les historiens, les experts du patrimoine, le grand public. Même Vladimir Resin [maire suppléant et ancien premier adjoint de Luzhkov] soutient cette idée.
L’argent n’est pas un problème. D’abord, le coût estimé de 1 milliard de roubles [24 millions d'euros] est fortement exagéré. En fait, le transfert coûterait seulement 6 millions de dollars. Et si cela représente une somme trop importante pour la ville, je peux trouver cet argent par moi-même. Beaucoup de Moscovites seraient contents de participer au financement de l’enlèvement. Après avoir annoncé mon projet de collecte publique, j’ai été contacté par plusieurs banques et sociétés qui souhaitent parrainer les frais de transfert. Il y aura sûrement une compétition entre les sponsors, parce que c’est une grande opportunité de publicité : une banque qui paierait pour le démantèlement de la statue deviendrait la banque préférée des Moscovites.
Le monument de Pierre le Grand n’est qu’un symbole de l’état désastreux de l’architecture à Moscou. Il y a des choses bien plus urgentes, par exemple arrêter la destruction de bâtiments du patrimoine pour les remplacer par de nouveaux bâtiments laids dans le centre historique de Moscou. Cela devrait être fait aussi tôt que possible. Nous avons une liste de 15 programmes qui devraient être menés pour sauver l’aspect historique du centre, et l’enlèvement de la statue de Pierre le Grand en fait partie. Mais je craisn toutefois que les autres questions soient ignorées une fois que la statue sera enlevée."
Photo publiée sur Wikimedia Commons.
Ce billet a été rédigé en collaboration avec le journaliste Ostap Karmodi.