AFRIQUE DU SUD

Un million de grévistes et des hôpitaux paralysés

Après une courte trêve imposée par la Coupe du monde de football, les syndicats sud-africains ont repris leur combat en août pour la revalorisation des salaires. Les écoles sont fermées, les procès reportés et les hôpitaux quasiment vides ce jeudi. Au total, un million de fonctionnaires se sont mis en grève. Lire la suite...

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Après une courte trêve imposée par la Coupe du monde de football, les syndicats sud-africains ont repris leur combat en août pour la revalorisation des salaires. Les écoles sont fermées, les procès reportés et les hôpitaux quasiment vides ce jeudi. Au total, un million de fonctionnaires se sont mis en grève.

A Johannesburg, la police a tiré des balles en caoutchoucs pour disperser des enseignants qui tentaient de bloquer un tronçon d'autoroute. Des échauffourées ont également éclaté dans plusieurs hôpitaux du pays où les grévistes ont essayé d'empêcher leurs collègues non grévistes et les patients d'entrer dans les bâtiments. A l'hôpital de Natalspruit de Gauteng, 11 infirmières et deux docteurs se sont retrouvés seules pour s'occuper de 500 patients, dont 23 bébés.

"C'était un désastre" a déclaré la représentante locale du ministère de la Santé, Qedani Mahlangu, qui est restée à l'hôpital jusqu'au petit matin jeudi. Deux bébés en sous poids sont morts dans la nuit de mercredi à cause du manque de soins.

Les syndicats réclament une augmentation de 8.6% de leurs salaires, un peu plus du double du taux d'inflation, ainsi qu'une aide mensuelle au logement de 1000 rands [106euros]. La semaine dernière, le gouvernement a proposé une aide au logement de 700 rand [74 euros] par mois, mais il a refusé d'augmenter les salaires de plus de 7%.

Vidéo postée par Amandla! sur Youtube.

"Si ceux qui travaillent peuvent à peine subvenir à leurs besoins, comment pourraient-ils aider leurs proches ?"

S'bu Zkode est le président d'un mouvement sud-africain d'habitants de bidonvilles.

Ce que demandent les fonctionnaires est totalement légitime. Leurs salaires sont ridicules comparés à ceux des officiels du gouvernement ou des députés. L'écart est injustifiable. On sait que les députés s'octroient chaque année de généreux bonus. Et ils ne peuvent pas augmenter les autres ? C'est de la folie.

 

Enfin le taux de chômage est très élevé en Afrique du Sud  [25,3% de la population active]. Ces chômeurs dépendent de ceux de leur famille qui travaillent pour survivre. Or si ceux qui ont un boulot peuvent à peine subvenir à leurs propres besoins, comment pourraient-ils aider leurs proches ?"

"Le gouvernement quand il nous dit qu'il ne peut pas nous augmenter de 7%. Ca ne tient pas debout"

Patrick Craven est le porte-parole national du Congrès des syndicats sud-africains (COSATU), qui a appelé ses membres à faire grève.

Nous ne croyons pas le gouvernement quand il nous dit qu'il ne peut pas aller au-delà de 7% d'augmentation Ca ne tient pas debout. Des milliers de fonctionnaires se battent pour survivre, alors qu'ils sont qualifiés et utiles à la société. Les aider devrait être une priorité nationale. Nous attendons des propositions rapidement de la part du gouvernement.

"Je trouve qu'il n'est pas acceptable que les grévistes aient bloqué des hôpitaux"

Sipho January travaille avec les communautés de Cape Town.

J'ai l'impression que la population est indécise, elle ne sait pas si elle doit soutenir les grévistes ou le gouvernement. Il est clair que les fonctionnaires ont le droit de faire grève. Le gouvernement affirme qu'il a déjà donné tout ce qu'il pouvait se permettre de donner. C'est peut-être vrai, mais il est difficile de croire qu'un pays qui a dépensé 30 milliards de rands [3'2 milliards d'euros] pour la coupe du monde n'ait pas les moyens de faire un geste de 5 milliards [54 millions d'euros] pour les fonctionnaires.

Les fonctionnaires sud-africains sont très mal payés, même si on compare avec des pays où le niveau de vie général est similaire. Un employé municipal commence par exemple à 8000 rands [857 euros], ce qui n'est pas assez pour obtenir un emprunt auprès d'une banque. Et un fonctionnaire qui dispose d'une licence et de 7 ans d'expérience gagne lui à peu près 14 000 rands [1 500 euros], ce qui est très peu pour vivre à Johannesburg.

Je trouve cependant qu'il n'est pas acceptable que les grévistes aient bloqué des hôpitaux. Ils mettent des vies humaines en danger et cela va éroder leurs soutiens au sein de la population."