YÉMEN

Ils se défoncent au qat "avec la bénédiction des parents"

Plusieurs vidéos montrant des enfants mastiquant du qat font le tour du Net arabe. Cette plante narcotique, aux effets stimulants, est consommée depuis des siècles au Yémen. Mais depuis quelques années, elle touche un public très jeune ; des enfants souvent initiés à cette drogue douce par leurs propres parents. Lire la suite...

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Plusieurs vidéos montrant des enfants mastiquant du qat font le tour du Net arabe. Cette plante narcotique, aux effets stimulants, est consommée depuis des siècles au Yémen. Mais depuis quelques années, elle touche un public très jeune ; des enfants souvent initiés à cette drogue douce par leurs propres parents.

Le qat est aux Yéménites ce que la baguette de pain est aux Français... indispensable. Cultivé pour la cathinone, une substance psychotrope concentrée dans ses feuilles, le qat est connu au Yémen depuis le XIIIe siècle (un ouvrage médical du médecin arabe Naguib ad Din le recommandait pour lutter contre la faim et la fatigue). On chique ses feuilles, le plus souvent en groupe, pour atteindre le "kayf", un état de gaieté et d'euphorie légère qu'un site spécialisé compare aux "effets d'une forte dose de caféine ou d'une faible dose de cocaïne".

Selon la Banque mondiale, la production du qat représente 6 % du produit intérieur brut (PIB) du Yémen, emploie 14 % de la main d'œuvre du pays et monopolise 30 % de l'eau consacrée à l'irrigation. Selon un sondage de la Banque mené au printemps 2006, 72 % des hommes yéménites affirment mâcher du qat, contre 33 % des femmes.

Selon ce même sondage, les Yéménites consomment cette substance pour la première fois à l'adolescence, entre 16 et 24 ans. Mais, comme nous l’explique notre Observateur, on trouve des accros au qat de plus en plus jeunes au Yémen. Une situation favorisée par une législation laxiste, qui n'interdit ni la production et ni la mastication du qat et ne fixe même pas d'âge minimum aux consommateurs.

Il chique puis apprend à fumer

Enfant mâchouillant du qat en présence d'un adulte qui l'aide à la fin de la vidéo à allumer une cigarette. Vidéo tournée au sud du Yémen, dans la province de Yafeh et postée sur YouTube par kasem712, le 5 février 2010.

Lors d'un mariage à Sanaa

Enfant chiquant du qat lors d'un mariage dans la capitale. Vidéo tournée postée sur YouTube par mwalad, le 14 février 2010.

"J'ai vu un enfant de 9 ans qui mâchouillait des feuilles de qat en présence de son père"

Hafid Nasser est étudiant à la faculté de gestion et des sciences économiques à Sanaa, capitale du Yémen.

Par le passé, il était très mal vu que des enfants consomment du qat. Mais depuis une dizaine d'années, on voit de plus en plus d'enfants en prendre. Souvent, ce sont les parents qui poussent leurs enfants à en mâcher durant des cérémonies publiques : mariages, funérailles, etc. Pendant le mariage d'un ami, j’ai vu une scène horrible, un enfant de 9 ans qui mâchouillait des feuilles de qat en présence de son père. Choqué, j’ai interpellé son père qui m'a simplement répondu que le qat était le 'sel des hommes'.

La consommation du qat touche toutes les couches sociales, son prix est très abordable [le qat est vendu par petits bouquets. Chaque bouquet coûte environ 40 centimes d'euros]. Les enfants accros au qat sont souvent des travailleurs mineurs persuadés, selon les croyances populaires, qu'ils seront plus efficaces s'ils en chiquent. Or, la consommation de cette plante présente de graves risques pour la santé. Plusieurs études ont observé une nette augmentation des taux de cancers de la bouche et de l’œsophage chez les grands consommateurs de qat au Yémen."

Il chique et chante

Vidéo postée sur YouTube par alsary33, le 29 décembre 2009.