Le "phallus" géant de Gazprom déchaîne les passions
Publié le : Modifié le :
Plusieurs milliers d’habitants de Saint-Pétersbourg ont manifesté, samedi, pour protester contre le projet de construction d’un gratte-ciel de 403 mètres (77 étages) en plein cœur du centre historique de leur ville.
Plusieurs milliers d’habitants de Saint-Pétersbourg ont manifesté, samedi, pour protester contre le projet de construction d’un gratte-ciel de 403 mètres (77 étages) en plein cœur du centre historique de leur ville. Malgré la multiplication des protestations, le futur siège du géant russe du gaz, Gazprom, est déjà en construction.
Le 6 octobre, le maire de Saint-Pétersbourg, Valentina Matviyenko, a donné son feu vert au projet de 1,6 milliard d’euros. Et ce malgré la menace brandie par l’Unesco d’exclure l'ancienne capitale impériale de sa liste du patrimoine mondial. Invités à se prononcer sur la question, les architectes Norman Foster, Rafael Viñoly et Kisho Kurokawa ont rejoint les rangs des opposants au projet. Selon un sondage commandé par une ONG, seuls 19,9 % des habitants soutiennent la construction de l’édifice, contre 66,4 % qui s’y opposent.
Dessiné par le cabinet d’architectes RMJM, le gratte-ciel ne respecte pas la règlementation qui impose une hauteur maximale de 42 mètres aux bâtiments de la ville. En outre, des archéologues ont fait de grandes découvertes l’an dernier sur le site de la future tour, dont des ruines datant du néolithique et des restes de ce qui fut l’ancienne ville suédoise de Nyenschantz. Les recherches archéologiques devront cesser au printemps conformément à une décision des autorités de la ville.
Le chantier près du site archéologique
La construction a déjà commencé près des fouilles archéologiques. Ces photos ont été prises par la blogueuse Natalia Vvedenskaya, malgré l’interdiction de photographier.
"Gazprom insiste pour construire son gratte-ciel monstrueux sur ce site"
Anatoly Kirpichnikov est à la tête du département archéologique finno-slave de l’Académie russe des sciences.
Des fouilles sont en cours depuis trois ans sur le site où Gazprom compte construire sa tour de Babylone. Récemment, un de mes collègues, Pyotr Sorokin, a découvert un site néolithique incroyablement riche en enseignements. Sur ce site se sont notamment succédé le village de Novgorod (XIIe siècle) et la forteresse de Landskrona édifiée par les Suédois en 1299. Avec toutes ces découvertes, on pourrait créer un musée. C’est un site unique qui comprend des restes d’architecture romaine, suédoise et russe.
Des reste de la tour.
À l’instar de ce qui se fait dans les villes européennes, on pourrait même exposer les ruines à ciel ouvert en recouvrant les vestiges avec des plaques en verre. Mais Gazprom insiste pour construire son gratte-ciel monstrueux sur ce site.
Un site funéraire de l’ancienne ville suédoise de Nyenschantz.
Les autorités de Saint-Pétersbourg sont d’accord. Le géant gazier finance actuellement les fouilles. Mail il reste 40 % du site à explorer et ils nous ont donné jusqu’au début du printemps pour le faire."
Les manifestations
Photo prise par Natalia Vvedenskaya.
Ce tract circulait lors de la manifestation. Intitulé "Erreur 403", en référence à la hauteur exacte de la tour, et au message d’erreur "Accès interdit" souvent visible sur Internet. L’image montre l’écart entre la tour et la cathédrale Smolny, de l’autre côté de la rivière.
"Miller, range ton phallus !"
Des manifestants se sont réunis autour des bureaux de Gazprom, à Saint-Pétersbourg, vendredi. Sur leur bannière, un message adressé au PDG du groupe gazier, Alexey Miller. Posté sur YouTube "Evelgoor".
"Gazprom, ne construis pas cette tour !"
Le groupe russe Mitki proteste en chanson. Posté sur YouTube par "volokhonsky".
"Si ça marche à Paris, alors Saint-Pétersbourg peut y arriver"
Cette vidéo est l’une de celles créées par le service de relations publiques de la tour Okhta de Gazprom. Le couple "interrogé" dans la séquence explique que lorsque des tours ont été construites à Paris, de gros investissements ont suivi. Même s’ils ont eu du mal à reconnaître les Champs-Elysées au début, ils s’y sont rapidement habitués, au point de les apprécier aujourd’hui. En réalité, les images sont celles du quartier d’affaires de la Défense...