Chassez les voleurs sur Internet
Pour combattre le vol à l'étalage, les responsables d'une chaîne de magasins ont décider de poster sur leur site les images de voleurs présumés prises à l'aide de caméras de surveillance. Et il offre une récompense de 500 pounds (580 euros) à la personne qui réussirait à identifier l'un des criminels. Samedi, le stratagème a fait sa première victime. Mais tout cela est-il bien légal ?
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Pour combattre le vol à l'étalage, les responsables d'une chaîne de magasins ont décider de poster sur leur site les images de voleurs présumés prises à l'aide de caméras de surveillance. Et il offre une récompense de 500 livres (580 euros) à la personne qui réussirait à identifier l'un des criminels. Samedi, le stratagème a fait sa première victime. Mais tout cela est-il bien légal ?
Au début du mois de juillet, les directeurs de la chaîne de magasins discount Home Bargains, qui compte 190 commerces dans tout le Royaume-Uni, demandaient à leurs managers de coller sur la devanture des magasins les images des clients suspectés de vol.
Quelques semaines plus tard, une version en ligne de cette chasse aux voleurs apparaissait sur le site de la chaîne. Une page intitulée Crimebusters (traqueurs du crime) a été mise en ligne avec les images de huit voleurs présumés, à visage découvert. Seulement trois semaines après, l'un d'entre eux, dont l'image a été depuis retirée du site, s'est fait arrêter.
Selon Home Bargains, dont le chiffre d'affaire annuel en 2008 s'élevait à 384 millions de pounds (446 millions d'euros), ses pertes dues au vol à l'étalage s'élèvent à 6 millions d'euros, soit 1,5% de leurs revenus. Le directeur des opérations, Joe Morris, affirme que cette méthode est le seul et unique moyen pour ses magasins de combattre le vol. Il assure que le police est au courant de ces pratiques et coopère avec eux ; il ajoute que les photos ne sont postées qu'à condition que la compagnie soit "tout à fait sûre" que la personne concernée a bien volé.
"Un système de justice privée dangereux et source de dérapage dans un État de droit"
Bruno Anatrella est juriste à Paris, spécialisé dans le droit à l'image.
Les caméras de surveillance au sein des magasins sont, en principe, autorisées si certaines conditions sont respectées. Le client doit, notamment, être informé de l'installation d'une vidéo-surveillance par une affichette ou un 'sticker' à l'entrée du magasin. La diffusion de telles images auprès du public, en imputant certaines infractions aux personnes identifiables, pourrait porter atteinte aux droits de celles-ci et être répréhensible, notamment sur le fondement de la diffamation ou de la présomption d'innocence.
Toutefois, s'il s'agit de personnes qui ont réellement commis une infraction - mais dont l'identité reste inconnue - celles-ci ne vont pas forcément réagir en invoquant la diffamation ou la présomption d'innocence. Ils risqueraient en effet de se retrouver face aux propriétaires des magasins qui, à leur tour, pourraient porter plainte pour vol - non plus contre X mais contre une personne qui d'elle-même a révélé son identité.
Je pense que ce genre de système, qui s'apparente à de la justice privée, peut être dangereux et source de dérapage dans un État de droit."
Identifiez ces visages et gagnez 580 euros !
Ces images sont actuellement diffusées sur la page "Crimebusters" du site de Home Bargain. Nous avons flouté les photos des visages, mais sur le site, ils sont clairement reconnaissables.
19 juillet, Old Swan, Liverpool.
26 juin, Bletchley, Milton Keynes.
12 juillet, Everton, Liverpool.