"A toi d’arrêter la cigarette, à nous de te marier"

Cet étrange slogan couvre en ce moment les murs de Riyad.

C’est la devise d’une campagne lancée le 21 juin par l’association Naqaa ("pureté") afin d’encourager les jeunes Saoudiens à arrêter la cigarette. Les fumeurs s’inscrivent à un programme de six jours au terme duquel ils doivent avoir dépassé leur addiction. Au septième jour, l’association tire au sort l'un des participants ayant suivi la cure avec succès. Elle s’engage à payer la dot du gagnant et à meubler entièrement la maison où il s’installera avec sa femme.

Les Saoudiennes n’apprécient pas toutes ce petit jeu. L’association est ainsi accusée par une journaliste du quotidien saoudien El Watan de présenter les femmes comme de simples "récompenses matérielles" qu’on accorde à un homme "repenti".

"A toi d’arrêter la cigarette, à nous de te marier" est la déclinaison d’une campagne lancée l’an dernier intitulée "A toi d’arrêter de fumer, à nous de payer ton pèlerinage à la Mecque". Des slogans qui semblent porter leurs fruits, à en croire Abdallah al-Aajimi, l’attaché de presse de l’association, selon lequel 16 000 jeunes Saoudiens renonceraient au tabac chaque année.

"Une bonne idée pour combattre le taux de célibat élevé chez les femmes"

Ezzi Enouani, 38 ans, vit à Ryad. Il est fonctionnaire au ministère de l’Education nationale.

Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent que cette idée porte atteinte à la femme saoudienne; au contraire, c’est une bonne idée pour combattre le taux de célibat élevé chez les femmes. En Arabie, la femme est sacrée, elle a une grande valeur dans la société. La seule chose qu’on peut vraiment reprocher à cette initiative est qu’elle ne concerne pas tous les jeunes Saoudiens, mais uniquement ceux de Riyad. L’association aurait dû donner la même opportunité à tous les jeunes, notamment ceux de l’ouest du pays, autour de Jeddah, car c’est une région où il y a beaucoup de cafés, de touristes, et donc beaucoup de jeunes qui fument."

"Le mariage coûte trop cher"

Abdallah Annachwani est journaliste et vit à Riyad.

Je trouve que l’idée est formidable car les jeunes ici ne se marient plus beaucoup. Le problème est surtout financier. Entre la dot qui coûte près de 7 000 euros, les frais de la cérémonie de mariage qui se montent à 21 000 euros et la lune de miel à 3 500 euros... Les jeunes ne peuvent pas s’en sortir, sachant que le salaire moyen est de 1 400 euros par mois en Arabie saoudite.

En plus de cela, inciter les jeunes à arrêter la cigarette est une très bonne chose. Le tabac, la drogue et le narguilé sont très consommés par les jeunes Saoudiens. Quant à ceux qui considèrent que ce programme porte atteinte à la femme, je trouve qu’ils ont tort. La femme est libre, elle n’est pas obligée d’accepter le mariage si elle ne le désire pas."