FRANCE

Policiers canardés à La Courneuve : "On ne veut pas mourir pour 1 600 euros par mois"

Un fourgon de police a été attaqué à l’arme de guerre, ce dimanche, à La Courneuve (Seine-Saint-Denis). Nos Observateurs tentent de nous expliquer pourquoi ça dégénère dans les banlieues françaises. Lire la suite...

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La Cité des 4 000 à La Courneuve. Photo postée sur Flickr par Linkef

En utilisant une Kalachnikov contre des fonctionnaires de police, les assaillants ont clairement franchi un cap dans la violence. Depuis l'attaque, qui n’a fait aucun blessé, une compagnie de CRS a été envoyée dans le département de la Seine-Saint-Denis, et une quarantaine de fonctionnaires parisiens sont venus renforcer les effectifs locaux. Nos Observateurs, un habitant de La Courneuve et un policier œuvrant dans le 93, nous livrent leurs points de vue sur ce fait divers sans précédent.

"La Courneuve, c’est pas Chicago !"

Didier Muller, 51 ans, vit à La Courneuve depuis 1999. Il est président de l’association "Faites la ville".

On est clairement dans l’escalade, on n’est plus dans les attaques à l’arme blanche. Il faut espérer que ça s’arrête là. On sait qu’il y a une économie parallèle à La Courneuve, comme ailleurs en France, mais là on se demande comment ils arrivent à se procurer ce genre d’armes. Les renforts de police vont rester combien de temps ? Quelques jours ? Ce n’est pas en mettant pendant une semaine une compagnie de CRS que les problèmes vont être réglés. Il y a un commissariat flambant neuf au milieu de la Cité des 4 000, mais il est fermé, faute de moyens.  

C’est vraiment regrettable que les efforts déployés par la municipalité soient ponctués par des faits divers aussi violents. La population aspire à vivre paisiblement. La Courneuve, c’est pas Chicago, elle ne se résume pas à la Cité des 4 000. C’est une commune pavillonnaire. On est capable de bien vivre ensemble, dans le cadre de la diversité. Il y a des événements qui y sont organisés et tout s’y passe parfaitement bien."

"Il suffit d’aller dans des cités du 93 pour se procurer des armes de guerre"

Éric Wernert, 34 ans, est délégué de l'Unsa-Police, l'unique syndicat policier du département de la Seine-Saint-Denis.

Entre collègues on se dit qu’on est arrivé à cours de solution. Ce n’est plus un problème de violence urbaine, c’est du banditisme. On n’est pas à l’abri d’un effet de mimétisme ou de surenchère dans la violence. On se demande comment ce type d’armes circule. Il suffit d’aller dans certaines cités du 93 pour se procurer des armes de guerre, c’est la réalité. Avec cette attaque, on a franchi une étape sur l’échelle de la violence. Les policiers qui travaillent dans ce département sensible, connaissent les risques du métier. Ça n’empêche pas un sentiment de peur et de frustration. Certains se demandent si ça vaut la peine de se faire tirer dessus avec un AK 47 pour 1 600 euros net par mois.

Il ne faut pas que les effectifs de police soient réduits, comme souhaite le faire le ministère de l’Intérieur. Enfin, il faut que notre métier soit reconnu comme dangereux, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui."