Internet dans le viseur du régime iranien
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Un conseiller du procureur général de Téhéran a annoncé cette semaine que plus de cinq millions de sites web au contenu "immoral" sont interdits d'accès dans le pays. Nos Observateurs iraniens réagissent. Lire la suite...
Photo de Mostafa Saeednejad.
Un conseiller du procureur général de Téhéran a annoncé cette semaine que plus de cinq millions de sites web au contenu "immoral" sont interdits d'accès dans le pays. Ces derniers temps, plusieurs cyberdissidents ont été arrêtés en Iran. Un blogueur vivant au Canada, Hossein Derakshan, aurait été récemment arrêté à Téhéran.
Nous avons demandé à deux de nos Observateurs iraniens de nous expliquer comment les censeurs opèrent pour museler le Web.
"Les internautes s’adaptent, ils arrivent à contourner cette censure"
Ali étudie à Téhéran et surfe quotidiennement sur Internet. Il souhaite rester anonyme.
Accuser les médias occidentaux de vouloir pervertir les Iraniens est une fausse excuse, en réalité, ils veulent juste nous surveiller. La population est très jeune en Iran, il y a beaucoup de blogueurs, et pour eux, le Web représente un espace de liberté où ils peuvent s’exprimer librement.
Ce filtrage est le résultat de la paranoïa du régime qui veut "purifier les esprits corrompus". Les internautes iraniens dont je fais partie savent que la Toile est filtrée et que certains mots-clés sont verrouillés. Mais certains s’adaptent, ils arrivent à contourner cette censure. Dans l’informatique tout va très vite, on trouve toujours des solutions."
"Le régime veut couper les relations entre le monde et les Iraniens"
Reza Moïni est le responsable du site d'information sur les droits de l'Homme Bidaran.net. Cet Iranien vit à Paris.
Ce chiffre paraît démesuré mais c’est possible. Il s’agit très probablement d’une opération de communication orchestrée par les autorités. Ils ont pour habitude de contrôler les moyens de communication des Iraniens. Avant l’ère Internet, le courrier et les conversations téléphoniques étaient déjà sous haute surveillance. Le régime veut couper les relations entre le monde et les Iraniens, alors il y met les moyens. Plusieurs cyberdissidents, dont une femme, ont été arrêtés ces derniers temps.
Différents moyens sont utilisés pour contrôler les internautes. Par exemple, la vitesse de connexion est dissuasive. En général elle est de 128 ko, une misère par rapport au nombre d’utilisateurs (l’Iran compte officiellement 21 millions d’internautes). Je pense que l’Iran est le seul pays de la région à avoir un débit aussi faible. Les censeurs utilisent des logiciels vendus par des entreprises occidentales pour contrôler la Toile et bloquer les sites qui les dérangent. Sachant que c’est l’État qui gère la commercialisation du matériel informatique et l’accès à Internet, c’st plus facile de tout contrôler. Les quelques fournisseurs privés d’accès à Internet sont aux ordres du régime et appliquent par conséquent les filtrages qui leur sont demandés. Bref le contrôle est quasi-total, mais certains informaticiens avisés font sauter aisément les verrous."