Scandale en Chine : des soldats japonais font l'apologie de la boucherie
Publié le : Modifié le :
Un boucher du Hunan a fait défiler de faux soldats japonais pour faire la publicité de sa viande d'âne. Pour une fois, Japonais et Chinois sont tombés d'accord : le sens de l'humour de ce commerçant est douteux. Lire la suite...
Un boucher du Hunan a fait défiler de faux soldats japonais pour faire la publicité de sa viande d'âne. Pour une fois, Japonais et Chinois sont tombés d'accord : le sens de l'humour de ce commerçant est douteux.
Cette étrange procession s'est déroulée le 4 novembre dernier dans les rues de Weihui, une ville du Henan. Un vendeur de viande d'âne a eu l'idée d'engager quatre hommes pour défiler dans la rue principale de la ville et devant le bureau de Sécurité publique déguisés en "diables", c'est-à-dire revêtus de l'uniforme des soldats japonais qui ont envahi la Chine lors de la Seconde Guerre mondiale.
Les plaies de la Seconde Guerre mondiale et les exactions du Japon impérialiste sont encore bien ouvertes. Cette procession a donc beaucoup choqué et elle est âprement discutée sur Internet.
Quand on lui demande d'où lui est venue cette idée saugrenue, il explique que pour faire face à une concurrence toujours plus rude, la clé de la survie est de lancer des campagnes de publicité audacieuses.
Deux de nos observateurs, un Chinois et une Japonaise, réagissent à cette procession publicitaire.
Le défilé d'une dizaine d'ânes faisait près de 30 mètres. Un petit orchestre jouait en tête de cortège. Accroché à la camionnette, une bannière : "Au paradis, il y a de la viande de dragon, sur terre, il y a de la viande d'âne".
La naissance de cette idée saugrenue : le propriétaire venait d'importer des ânes du Gansu ; au même moment, la troupe de théâtre d'un de ses amis recevait un lot d'uniforme japonais...
Ils portent l'uniforme et les casquettes des "diables" japonais et des fusils en bandoulières.
"Le racisme reste très présent envers les Japonais"
Yukari Fujiwara est Japonaise. Elle est actuellement traductrice en France.
Ça me dégoute. Pour nous, tout ça, c'est du passé. C'est difficile pour moi de parler de notre histoire avec la Chine. C'est un sujet très sensible pour les deux pays, et utiliser le sujet pour de la publicité me choque vraiment. Le boucher savait qu'il jouait avec un traumatisme et que les réactions seraient fortes.
Le racisme reste très présent envers les Japonais. J'ai beaucoup voyagé. Au Canada, j'ai rencontré un Coréen qui m'a dit qu'il ne parlait pas aux Japonais [la Corée a été occupée par le Japon de 1905 à la défaite de 1945]. J'ai pu remarquer que les jeunes étaient plus durs encore que les personnes âgées.
C'est difficile à gérer pour nous. Dès qu'un Coréen ou un Chinois parle de cette période, je ressens une forte culpabilité. Peut-être que c'est parce que j'ai étudié l'histoire et que je sais ce qu'on a fait. La Japon et la Chine n'arrivent pas à faire un trait sur leurs souvenirs de guerre."
"C’est scandaleux de faire passer les affaires avant l’histoire"
China Wolf est un Chinois vivant actuellement au Canada.
J'ai trouvé ça très dérangeant et décevant de la part d'un commerçant. C'est scandaleux de faire passer les affaires avant l'histoire. Mais même si les réactions sont fortes, il faut préciser que les relations entre la Chine et le Japon sont bien meilleures aujourd'hui qu'il y a quelques années. L'ancien Premier ministre japonais Fukuda a reconnu les crimes de guerre perpétrés par les soldats nippons lors de la Seconde Guerre mondiale [à l'occasion de l'anniversaire de la capitulation du Japon. A la différence de ses prédécesseurs, il a refusé d'aller se recueillir au sanctuaire de Yasukuni où sont honorés quatorze criminels de guerre]. Plusieurs accords commerciaux ont même été signés. Les Chinois ne détestent pas les Japonais, mais ils sont traumatisés par les crimes du Japon fasciste de l'époque. C'est un peu comme entre la France et l'Allemagne."