FIAC : malgré la crise, les collectionneurs ont sorti le chéquier
David MACH, Che, 2008. Sculpture en allumettes. 20 000 euros. Photo : courtesy Jérôme de Noirmont. La Fiac, la plus grande foire d'Art contemporain de France, a fermé ses portes dimanche. On pouvait craindre qu'en pleine crise financière, les collectionneurs soient frileux. Pas vraiment. Lire la suite et voir les photos d'œuvres vendues.
Publié le :
La Foire Internationle d'Art contemporain dimanche, au Grand Palais.
La Fiac, la plus grande foire d'Art contemporain de France, a fermé ses portes dimanche. On pouvait craindre qu'en pleine crise financière, les collectionneurs soient frileux. Pas vraiment.
Des galeristes et un spécialiste d'Art contemporain nous donnent leur sentiment sur la cuvée 2008 de la Fiac.
"L'orage a éclaté, mais personne n'est encore mouillé"
L'un de nos Observateurs, Pierre Douaire, professeur d'histoire de l'art et critique d'Art à Paris, s'est rendu à la Fiac.
Malgré la crise, la Fiac, installée au Grand Palais et dans la cour carré du Louvre, fait salle comble. J'y suis allé dimanche et la file d'attente s'étirait sur 200 mètres. Malgré un ticket prohibitif à 25 euros, les visiteurs ont été plus nombreux que les 70 000 de l'an passé. Le public s'habitue aux grandes messes de l'art contemporain, comme la Nuit blanche le démontre également chaque année.
Les collectionneurs sont au rendez-vous. Mais j'ai eu le sentiment qu'ils sont plus prudents et plus réfléchis. Le chiffre d'affaire sera sûrement divisé par deux par rapport à l'an dernier, mais 2007 avait été une année d'euphorie irrationnelle. Les amateurs achètent peu, moins cher et ils prennent plus de temps pour réfléchir. Ils ont besoin d'être rassurés. J'ai pu voir que leurs choix se portent soit sur des artistes confirmés, soit sur des jeunes, car ils sont moins cher.
Ce sont les galeries jeunes mais en développement qui sont les plus stressées. Les petites structures s'en sortent car elles ont des frais de fonctionnement moins élevés. Et les gros mastodontes ont l'envergure et l'expérience pour affronter ces crises cycliques.
Jusque ici, tout va bien, mais personne n'est dupe. Il n'y a pas encore eu de licenciements, mais les projets sont revus à la baisse. La situation semble paradoxale : l'orage a éclaté, mais personne n'est encore mouillé."
"Vu la conjoncture, le résultat est satisfaisant"
Philippe Valentin dirige avec son épouse la galerie "Chez Valentin", qui mise sur les jeunes artistes et dont les œuvres sont accessibles en terme de budget (de 800 à 30 000 euros).
La crise n'a pas d'impact sur les ventes, mais elle en a sur les comportements. Lors de la négociation d'une vente, les collectionneurs plaisantent en nous disant "Attention c'est la crise, il faut baisser les prix". Contrairement à Londres, Paris n'est pas un marché de Traders. Notre public ne dépend pas d'une seule catégorie sociale, heureusement.
Je suis un galeriste heureux car Laurent Grasso, l'un de nos artistes, vient d'obtenir le prix Marcel Duchamp. Cela lui donne une belle visibilité pour lui et l'occasion d'exposer à Beaubourg. Mais même avant cette récompense, nous avions déjà vendu des sérigraphies de lui à 4000 euros pièce sans problème. Même notre plus grosse pièce, "Bonne nuit les petits" de Pierre Ardouvin, qui coûte pourtant 30 000 euros, a trouvé preneur.
Nous étions anxieux et inquiets avant la foire. Vu la conjoncture, le résultat est satisfaisant. Le prochain rendez-vous international sera Art-Basel à Miami. Il est certain que nous ne prendrons pas le risque de venir avec des grosses sculptures très chères, pour ne pas les avoir sur les bras. Car les Américains ont été touchés plus durement et plus tôt que nous."
Deux œuvres que j'ai vendues cette année :
Pierre Ardouvin, Bonne nuit les petits, 2008. Sculpture lumineuse. Vendu 30 000 euros. Photo : courtesy galerie "Chez Valentin".
Laurent GRASSO, Retroprojection, 2007. Serigraphie argent. 150 x 150 cm. Vendu 4000 Euros. Photo : courtesy galerie "Chez Valentin"
"La conséquence principale, c’est de voir revenir les "vrais" collectionneurs"
Ancien antiquaire, Jérôme de Noirmont a ouvert sa galerie d'art contemporain avenue Matignon il y a 15 ans. Il est à l'origine de l'exposition actuelle de Jeff Koons au château de Versailles.
La crise financière actuelle est palpable. Vendre jusqu'à 50 000 euros ne pose pas de problème, mais au-delà ça devient très difficile. Je ne pense pas qu'une galerie vende une œuvre de plus 500 000 euros. Mais les prix n'ont pas encore baissés et nous sommes encore loin de ressentir les mêmes effets que lors de la crise qui avait ébranlé le marché de l'art au début des années 1990. La période de récession qui s'annonce chasse deux années d'emballement spéculatif que certains jugeaient inquiétantes.
La conséquence principale, c'est de voir revenir les "vrais" collectionneurs. Ceux-là ne sont pas mécontents du coup de balai qui se prépare. Il permettra de mettre fin à la spéculation. En tant que galeristes, nous revenons à notre vrai métier : nous conseillons, nous expliquons plus. Les achats ne sont plus aussi impulsifs qu'avant.
Nous revenons à une situation normale. Le réalisme remplace l'euphorie douteuse. La situation redevient saine et les bons artistes reprenne de la valeur. Ce n'est que justice. Et puis le vrai aspect positif de la Fiac, cette année, c'est que le public est de plus en plus nombreux."
Deux œuvres que j'ai vendues cette année :
David MACH, Che, 2008. Sculpture en allumettes. 20 000 euros. Photo : courtesy galerie Jérôme et Emmanuelle de Noirmont.
Fabrice HYBER, Peace and Love, 2008. Peinture, 50 000 euros. Photo : ourtesy galerie Jérôme et Emmanuelle de Noirmont.