Un syndicat français tente le buzz sur le Net
L'ascenseur social français est panne. C'est le constat que tire une série de vidéos sur le web, qui met en scène sept collègues de travail bloqués dans une véritable cabine d'ascenseur. Cette campagne de marketing viral a été réalisée à la demande d'un syndicat français, la CFTC, qui vise à rajeunir son image avec des vidéos à l'humour décalé. Voir les vidéos et lire la suite...
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L'ascenseur social français est panne. C'est le constat que tire une série de vidéos sur le web, qui met en scène sept collègues de travail bloqués dans une véritable cabine d'ascenseur. Cette campagne de marketing viral a été réalisée à la demande d'un syndicat français, la CFTC, qui vise à rajeunir son image, avec des vidéos à l'humour décalé.
Avec 8 % de syndiqués, contre 30 % en Grande-Bretagne et 23 % en Allemagne, la France occupe la dernière place du classement des pays européens en terme de taux de syndicalisation des travailleurs.
La Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), l'une des cinq centrales syndicales représentatives de droit en France, est bien décidée à regagner du terrain en vue des élections prud'homales de décembre prochain.
Dans la droite ligne des épisodes du "Bureau" (à l'origine "The Office", au Royaume-Uni), la série « Dark Elevator » dresse un portrait au vitriol du monde du travail en France.
Episode " La manif "
Postée sur YouTube par DarkElevator
"La CFTC n’avait à peu près aucune idée de ce que serait le projet final, ils nous ont laissé carte blanche"
Stéphanie Sphyras a écrit et réalisé la série Dark Elevator avec Benoit N'Guyen Tat et Guillaume Cremonese. Ils dirigent ensemble la maison de production "Courte Focale".
Nous n'avons pas traité directement avec la CFTC puisqu'eux-mêmes avaient délégué ce projet à une agence, qui est rentrée en contact avec nous. L'objectif à l'origine était assez vague, l'idée était de changer leur image en lançant une campagne de marketing viral.
La CFTC n'avait à peu près aucune idée de ce que serait le projet final, ils nous ont laissé carte blanche.
C'est pas tous les jours que l'on peut travailler avec autant de liberté, donc on a profité de l'occasion pour parler de sujets qui nous touchent.
Notre projet a été accepté quasiment tel quel, nous n'avons subi aucune censure après l'avoir présenté.
Les comédiens sont des acteurs professionnels pas forcément syndiqués. Moi-même, je ne suis pas syndiqué. La démarche dans l'équipe n'était pas celle de militants syndicaux. On avait envie de construire un projet ensemble autour de sujets nous interpellent, comme la précarité, qui touche beaucoup le milieu artistique. En fait, on a tous sauté sur l'occasion et on a complètement dépassé la commande de départ."
"Le milieu syndical est souvent perçu comme un milieu très fermé et un peu ringard"
Dominique Bertrand est le secrétaire général de la Fédération "Protection sociale et Emploi" de la CFTC. Il est membre du conseil confédéral du syndicat.
Il y a eu un débat au sein du conseil sur le fait de savoir si oui ou non nous devions utiliser les nouveaux médias. Ce qui a été conclu, c'était que l'objectif n'était pas de faire plaisir aux adhérents mais de contacter un public plus large et de gagner des adhérents. Mon point de vue personnel sur la question n'est pas intéressant ici. L'important, c'est l'impact. Et aujourd'hui, je remarque que j'ai été en contact avec des personnes qui ne m'auraient pas contacté par ailleurs.
On a pu développer une façon très différente de parler du syndicalisme. On passe de zombie à des citoyens normaux. Le milieu syndical est souvent perçu comme un milieu très fermé et un peu ringard et là, on le découvre dans un cadre ludique. Le message de la CFTC n'est pas immédiatement perceptible, mais nous nous présentons comme une organisation qui s'intéresse aux gens dans leur globalité. Et c'est efficace."
"La société française (…) semble plus capable de défier l’autorité"
Gerry Strange est professeur d'économie au Royaume-Uni. Il a publié plusieurs ouvrages sur le syndicalisme en Europe.
A l'époque, les syndicats britanniques auraient été intéressés par une telle forme d'action satirique. Par exemple, pour "May Day" (le jour de la fête du travail), les syndicats organisaient toutes sortes d'interventions politiques et festives pour célébrer le mouvement, ses victoires ainsi que les luttes en cours. Les antennes locales montaient des pièces. Pendant la soirée, on chantait des chansons, on jouait la comédie ou on récitait de la poésie etc... Malheureusement le syndicalisme britannique traditionnel ne s'est jamais remis des jours sombres du thatchérisme.
A l'inverse, la société civile française comprend certaines organisations syndicales plus réceptives aux idées radicales, comme la satire ou le mouvement de critiques situationniste. Elle semble plus capable de défier l'"autorité". Je ne peux pas m'empêcher de penser à "Sicko", le film de Michael Moore. Selon lui, la différence entre les Américains et les Français, c'est que les Américains ont tendance à accepter leur soumission à l'"autorité" de l'économie de marché. Le film constate qu'aux Etats-Unis, les gens ont peur de l'Etat, alors qu'en France, c'est l'Etat qui a peur de la société. C'est triste mais les Britanniques ont tendance à ressembler aux Américains. "
Episode "Les JO du précaire"
Postée sur YouTube par DarkElevator
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