Le policier rappeur du 9-3
Le Brigadier est un rappeur masqué qui affirme faire partie d'une patrouille de police, en banlieue parisienne. En dénonçant certaines pratiques policières, il a violé le devoir de réserve imposé à tout policier. Une enquête interne a été ouverte pour tenter de le démasquer.
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Le Brigadier est un rappeur masqué qui affirme faire partie d'une patrouille de police, en banlieue parisienne. En dénonçant certaines pratiques policières, il a violé le devoir de réserve imposé à tout policier. Une enquête interne a été ouverte pour tenter de le démasquer.
Il prétend avoir "dix ans de patrouille dans le 93 (Seine-Saint-Denis)". Le Brigadier a choisi de s'exprimer librement à travers la musique pour dénoncer les bavures policières et parler de son vécu. Ses premiers morceaux ont défrayé la chronique et suscité des réactions au ministère de l'Intérieur et parmi ses collègues, à tel point qu'une enquête interne a été ouverte pour tenter de le démasquer. Aujourd'hui, le Brigadier se dit "sous pression" et affirme que "l'étau se resserre" autour de lui.
"Etat d'urgence", prochain album du Brigadier
Posté sur Yotube par clipvideocops
"Sa démarche va à l’encontre de l’éthique policière"
Sébastien Bailly est secrétaire régional adjoint dans le 93 du syndicat Alliance.
Si le Brigadier est bien un policier, ce qui reste encore à démontrer, il risque une sanction disciplinaire allant de l'avertissement au blâme. Dans son cas, il s'agira sûrement d'une exclusion temporaire pouvant aller de 15 jours à 2 ans voire même un licenciement. Si il s'avère qu'il n'est pas policier, l'administration syndicale peut porter plainte mais il y a peu de chance que cela aboutisse, à moins qu'il nomme des membres de la police dans ses textes. Dans ce cas, les personnes peuvent porter plainte pour calomnie ou éventuellement atteinte à la vie privée.
Au niveau de la police, il sera sûrement mis à l'écart par ses collègues qui désapprouvent, pour la plupart, sa démarche. Bien sûr, il n'y aura pas de conséquences physiques, on ne va pas se battre pour ça !
Les dysfonctionnements internes, c'est le travail des organisations syndicales. Ca ne sert à rien de jouer les justiciers dans la musique. Il aurait pu venir nous voir mais il préfère jouer du phénomène police pour se construire une notoriété. Pour nous, sa démarche va à l'encontre de l'éthique policière. Le devoir de réserve est essentiel pour garantir le bon déroulement des enquêtes et maintenir une ligne de conduite.
Pour ce qui est de l'image de la police, un sondage réalisé à Aulnay-sous-Bois, une ville sensible de la banlieue parisienne, a révélé que plus de 80 % des gens étaient satisfaits du travail des forces de l'ordre. Seule une minorité qui vit de trafic dans les cités trouve à redire."
"Certains de mes collègues se sont fait passer à tabac pour avoir dénoncé des bavures"
Le Brigadier est un rappeur-policier du 93
Certains me voient comme un policier rebelle qui se lance dans la musique pour partir avec un parachute doré. Je veux juste parler de mon vécu pour que le métier soit plus reconnu car aujourd'hui l'image que l'on se fait du policier est très loin de la réalité. C'est vrai qu'il y a des racistes et des dérives mais beaucoup font leur travail avec sérieux.
Dans mes premiers morceaux, je parle des aspects négatifs mais dans l'album dont la sortie est prévue en février, la plupart des titres évoquent les valeurs du métier. En septembre, sortira "Opération coup de poing", un morceau réalisé en collaboration avec des gardiens de la paix, des anciens fonctionnaires et des adjoints de sécurité (ADS).
Pour moi, le devoir de réserve qui interdit de parler des dysfonctionnements du système est immoral. L'autre jour, nous avons été appelés dans un quartier sensible pour aider une personne en crise de démence. Nous avons dû utiliser une ceinture de contention afin qu'elle ne se fasse pas mal. Certaines personnes de la cité ont cru que nous agressions cette personne et nous nous sommes fait caillasser. Aujourd'hui nous ne pouvons plus nous permettre de garder le silence, il y a trop d'amalgames, il faut rétablir la vérité.
Sarkozy est allé trop loin avec des expressions comme "nettoyage au Kärcher" et "racaille". Il n'a fait qu'aggraver les relations déjà tendues entre les jeunes et la police. Sa stratégie est claire, il nous a collé une ancienne ministre de la Défense à l'Intérieur !
Psychologiquement, c'est un métier très dur. Beaucoup de collègues partent au château de Courbat, où les policiers peuvent bénéficier d'un soutien psychologique. La loi du silence pèse lourdement sur les consciences, mais c'est la règle. Ceux qui y dérogent doivent faire fasse aux conséquences. Certains de mes collègues se sont fait passer à tabac pour avoir dénoncé des bavures. Aujourd'hui, je suis sous pression, je sens que l'étau se resserre autour de moi. Lorsque j'ai commencé la musique, j'étais loin de me douter que j'en arriverai là. Mon staff m'a alerté sur des menaces postées dans ma boîte mail. Je ne sais pas si je regrette, j'évite de me poser la question.
La musique, pour moi, ce n'est pas un plan de carrière. Mon album n'est qu'un carnet de bord, une manière de tourner la page police et d'amorcer ma reconversion professionnelle."