Birmanie : deux ans après le coup d’État, les incendies sont devenus une arme de guerre redoutable
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Deux ans après le coup d’État du 1er février 2021, la junte birmane continue de réprimer brutalement la dissidence démocratique. Les incendies, utilisés pour brûler des villages entiers et couper les vivres et le moral de la résistance, sont devenus l’une des principales armes de cette répression.
Des centaines de maisons, provisions et réserves de nourriture parties en fumée : en Birmanie, le feu est devenu une arme de guerre de choix pour la junte militaire qui affronte la résistance, c'est-à-dire les Forces de défense du peuple (PDF) et les organisations ethniques armées (EAO).
La junte a été accusée de graves violations des droits de l'Homme, notamment d'arrestations arbitraires, de massacres, de violences sexuelles et de torture. Des activistes affirment qu'ils ont également incendié de nombreux bâtiments et des villages dont les habitants manifestent leur sympathie envers l'opposition.
🔥Fires in Sagaing
— Myanmar Witness (@MyanmarWitness) January 30, 2023
On 23 January 2023, SAC allegedly burned down 7 villages in Yin Mar Bin Township. Footage appears to show PDF troops extinguishing the fires afterwards.
FIRMS was able to detect fires in 5 of the 7 villages claimed.#WhatsHappeningInMyanmar#myanmar pic.twitter.com/WhYDolNE29
Il est difficile de traquer ces incendies, mais des ONG et des groupes de défense des droits de l’Homme tentent de les documenter. Parmi eux : Myanmar Witness, qui a utilisé des outils en source ouverte pour vérifier et recenser les incendies criminels présumés sur une carte.
Cette carte compile les occurrences de bâtiments et de villages détruits par le feu. Chaque cas part d’un rapport dans les médias ou de témoins oculaires, ensuite vérifié par des analystes à l'aide de données en temps réel provenant de la Nasa et d'images satellites.
🔥Village burnt
— Myanmar Witness (@MyanmarWitness) January 11, 2023
☑️22.139299, 95.840767
☑️Shan Kone, Bouk Thauk, Sagaing
☑️21 December 2022
3 civilians, including an elderly woman, were allegedly killed, with ~3,400 people left homeless by the attack.
Firms https://t.co/bd6szJUxMY
Source https://t.co/rJfmkZNono#Myanmar pic.twitter.com/rA0lmqSFS0
“Le feu crée probablement le plus haut niveau de chaos, au coût le plus faible pour les militaires”
Dans l’émission des Observateurs de France 24 de cette semaine, un des analystes de Myanmar Witness détaille cette stratégie de la junte.
La junte brûle des dizaines de demeures de civils chaque mois, et ce, depuis au moins fin 2021. Et ces chiffres ne font que progresser. La junte militaire veut instiller la peur au sein de la population, que ceux qui voudraient rejoindre l'opposition aient peur que leur abri et leurs ressources alimentaires ne soient pas sécurisés s'ils le faisaient.
L'une des stratégies de la junte, c'est de créer le chaos dans la société. Le feu crée probablement le plus haut niveau de chaos, au coût le plus faible pour les militaires. De leur point de vue, c'est peut-être la stratégie la plus efficace, et c'est pourquoi la junte militaire y recourt si souvent.
Selon Myanmar Witness, les incendies se sont multipliés en décembre 2022, il s'agit du pire mois jamais enregistré.
Nous recueillons, documentons et conservons, analysons et vérifions les cas d'atteintes aux droits de l'Homme, ce qui inclut les incendies. Nous passons donc en revue le contenu en source ouverte sur Internet, comme les messages publics sur les réseaux sociaux et les articles sur les sites d'information.
Nous utilisons également des outils accessibles publiquement, tels que FIRMS, un outil en ligne de la Nasa qui fournit des informations sur les incendies actifs en temps quasi réel.
La carte FIRMS de la Nasa utilise des capteurs thermiques et infrarouges pour signaler les incendies dans le monde entier en quelques heures.
Myanmar Witness espère que les preuves qu’ils ont amassées finiront par obliger la junte à rendre des comptes. D'autres ONG et organismes internationaux recueillent des preuves des crimes internationaux commis par la junte militaire afin de les présenter à la Cour pénale internationale.